Les départs de Götze et Lewandowski en 2013 et en 2014 au Bayern Munich pourraient laisser penser que ce sort frappera aussi l’actuel homme en forme du Borussia Dortmund : Marco Reus. La saison dernière, plusieurs rumeurs de transfert vers le club bavarois tournaient autour de l’international allemand. Pourtant, bon nombre d’éléments indiquent qu’un tel départ est, ou parait du moins, impossible.
Raison numéro 1 : une carrière à la progression graduelle
Le tout premier club de Marco Reus est le Post SV Dortmund, où il commence à taper dans le ballon à l’âge de 4 ans. À 6 ans déjà, il signe dans les équipes de jeunes du Borussia Dortmund. Il connaît quelques difficultés pour y percer, et signe, tout comme Kevin Großkreutz auparavant, au Rot-Weiss Ahlen. Il fait ses premiers pas avec l’équipe première à 18 ans et parvient à s’y imposer comme joker. Il inscrit même le but décisif à la dernière journée, qui assure la montée en 2. Bundesliga à Ahlen. C’est en deuxième division allemande que Reus se fait pour la première fois remarquer comme joueur au grand potentiel. Il parvient à se faire une place en tant que titulaire, et la saison suivante il signe à Mönchengladbach. L’équipe est à ce moment déjà en Bundesliga, et Reus est tout de suite considéré comme un joker de luxe. Il se distingue rapidement en marquant son premier but dès le 28 août. l’Allemand se transforme en joueur essentiel pour son équipe, même si celle-ci souffre énormément, écumant la majorité de la saison à la dernière place. Ce n’est qu’à l’avant-dernière journée qu’elle remontera à la 16e place, synonyme de barrages de relégation. Les matchs aller-retour ont lieu contre le VfL Bochum, et, après une victoire 1-0 à l’aller, c’est une égalisation de Marco Reus qui offre le match nul à Mönchengladbach, les maintenant en Bundesliga.
Dès la fin de sa première saison, en mai 2010, il est convoqué en sélection allemande, mais il doit décliner celle-ci et la fois suivante, pour cause de blessure. Rapidement, il fait l’objet de toutes les convoitises mais reste dans un premier temps dans ce Borussia. Reus poursuit sa progression à travers les saisons 2010-2011 et 2011-2012, et parvient même à terminer 4e à la fin de sa troisième saison dans l’élite, et ainsi qualifier son équipe pour la Ligue des champions. Mais son départ s’était décidé bien avant : dès le 4 janvier 2012, Mönchengladbach annonce que Reus quitterait le club à travers sa clause de départ de 17 millions d’euros. Le jour même, Dortmund se sert de cette clause et annonce l’arrivée du jeune Allemand pour la saison suivante. Le joueur a pour le moment un parcours dans lequel il n’a pas grillé les étapes, où il a pris le temps d’améliorer son football et assouvir sa place dans l’équipe dans laquelle il est, avant d’aller voir ailleurs. Pour Preuve, il est resté 3 saisons dans un Borussia avant de signer dans l’autre, alors qu’il avait des propositions dès la fin de sa première année. En signant au Bayern, où il ne serait qu’une star parmi les autres, une place de titulaire indiscutable ne lui serait pas assurée, du moins pas à long terme. S’il devait quitter Dortmund, Reus signerait plutôt dans un club où il pourra jouer, dans ses bonnes et ses moins bonnes phases de forme.
Raison numéro 2 : Dortmund, sa ville
Marco Reus voit le jour le 31 mai 1989 à Dortmund. En effet, le numéro 21 de la Mannschaft a beau avoir éclaté au grand jour à l’autre Borussia, c’est bien dans la ville jaune et noire qu’il a vu le jour. Comme mentionné plus haut, il intègre la formation du BVB dès l’âge de 6 ans et traverse les différentes catégories jusqu’à ses 16 ans. Si Marco Reus a quitté une première fois sa ville natale, ce n’est pas par envie d’ailleurs, mais bien de force, car son avenir au Borussia était bouché à ce moment-là. Chaque étape de sa carrière l’a mené à un retour progressif vers les sommets du football allemand, de la 3.Liga à envoyer Mönchengladbach en Ligue des champions. Quand il revient à Dortmund, le club est double champion d’Allemagne en titre, il vient d’emporter la Coupe d’Allemagne en humiliant le Bayern. La traversée du désert des années 2000 est définitivement terminée. C’était pourtant pendant cette traversée du désert que Reus n’avait pas pu s’imposer, et le retour dans une équipe qui a tout gagné en Allemagne la saison précédente s’avère triomphal.
La question se pose dans un premier temps : si Klopp arrivera à trouver un schéma tactique dans lequel Reus, Götze et Lewandowski pourraient coopérer. Non seulement il parvient à trouver une forme de jeu incluant les trois hommes, mais celle-ci va exploser au niveau européen. Même en Bundesliga, les Jaune et Noir n’auront aucune chance face à un Bayern, leader de la première à la dernière journée. En Ligue des champions, leur parcours sera exceptionnel atteignant la finale qu’ils perdent face à des Bavarois plus réalistes. Ce Dortmund, incapable dans les saisons précédentes de s’extirper de la phase de poules, existe notamment grâce au talent de Marco Reus, qui s’intègre parfaitement au football « heavy-metal » de Jürgen Klopp. Le départ de Mario Götze freine certes un peu les ambitions du Borussia au niveau européen, mais le club est en mesure de défendre sa place de vice-champion d’Allemagne et va en finale de la Coupe d’Allemagne. La saison 2013-2014 est également la première de Pierre-Emerick Aubameyang, qui va se dévoiler incontournable et partenaire parfait pour Reus. Après l’immense déception qu’a été la non-participation à la Coupe du monde au Brésil, il va vivre une saison 2014-2015 parsemée de blessures, pendant laquelle Dortmund va se rendre compte à quel point il est important pour son jeu. À chaque retour de blessure, le milieu offensif offrira des points très importants dans cette année difficile.
Cette année, Reus forme avec Mkhitaryan et Aubameyang un trio infernal qui, même si le Bayern maintient une avance confortable, met le feu en Bundesliga. Alors que beaucoup se posaient des questions sur la capacité du joueur à pouvoir se passer de Götze et Lewandowski, il a prouvé qu’au-delà d’une simple question de coéquipiers, il est devenu la pièce maîtresse de son club de toujours. Au vu de sa relation avec les supporters et de son investissement lors des derbys face à Schalke, il est difficile de concevoir Reus jouer dans un autre club allemand.
Raison numéro 3 : des blessures récurrentes
Si pour définir Marco Reus, on emploie le terme « l’international allemand » et non « champion du monde », c’est à cause d’une blessure. Lors du dernier match de préparation de l’équipe d’Allemagne face à l’Arménie, il tombe après un contact avec un joueur adverse et se blesse à la cheville gauche. Tout le pays retient son souffle. Malheureusement, la blessure est trop importante pour envisager une participation à la compétition au Brésil. Son ami Mario Götze aura beau porter sur lui un maillot floqué à son nom, avec le numéro 21 repris par Mustafi, officiellement le joueur de Dortmund n’est pas champion du monde. Reus ne se laisse néanmoins pas abattre et se bat tout l’été pour retrouver la forme. Il reprend la saison avec un Dortmund à la forme moyenne, qui a des difficultés au démarrage. Néanmoins il arrive avec son jeu à offrir à son équipe des points qui vont se révéler décisifs en fin de saison. Mais lors de son retour en équipe d’Allemagne face à l’Ecosse, à Dortmund qui plus est, il rechute suite à un duel avec un défenseur écossais. Il sera absent des terrains pendant 2 mois, 2 mois pendant lesquelles les Jaune et Noir et la Mannschaft souffrent de son absence. À son retour en décembre, Dortmund est dernier, luttant pour le maintien, et a un besoin désespéré de son milieu offensif. Reus fera quelques rechutes mineures, mais il va être une pièce essentielle qui permettra au Borussia d’atteindre la Ligue Europa et d’aller en finale de la Coupe d’Allemagne. Cette saison encore, Reus a quelques soucis de santé, qui durent rarement plus d’une semaine.
L’international allemand profite de son statut de joueur irremplaçable au sein du club de la Ruhr, statut qu’il aurait dans n’importe quel autre club allemand se battant pour la Ligue des champions. N’importe lequel sauf un : le Bayern. Quand le jeune Thiago Alcantara se blesse juste avant la fin de la période de transfert d’été 2014, les Bavarois ne perdent pas de temps et recrutent le milieu défensif du Real Madrid, Xabi Alonso. Si Marco Reus signe demain à Munich, il pourrait certes être titulaire à ses débuts, mais les dirigeants du club perdraient patience au fil des blessures et iraient chercher un autre joueur de couloir et/ou milieu offensif pour prendre sa place, et pas uniquement de façon temporaire. Le Bayern Munich est devenu une machine à gagner, qui soit produit ses propres joueurs, soit qui les achète prêts à l’emploi. Et quand la marchandise n’est pas satisfaisante, elle reste sur l’étagère ou est revendue à prix d’or. Reus courrait alors le risque de finir sur le banc munichois, voire de perdre sa place en équipe d’Allemagne. Certes d’autres joueurs comme Poldolski ou Klose ont pu conserver leur statut d’internationaux tout en cirant le banc au Bayern, mais ils n’avaient non seulement pas de réelle concurrence en sélection, mais ils ont quitté la Bavière pour l’étranger, afin que leur situation ne s’aggrave pas. Outre-Rhin, de jeunes joueurs se bousculent dans les positions d’ailier, capables de pallier l’absence de Marco Reus et le quatrième titre mondial conquis sans lui est la preuve que l’équipe peut s’en sortir sans lui. Rester à Dortmund ou partir dans un club comme Wolfsburg ou Liverpool lui permettrait de conserver le temps de jeu nécessaire pour poursuive sa carrière internationale.
Raison numéro 4 : le faux argument du meilleur ami
« Si insérer nom d’un joueur signait à insérer nom d’un club, il retrouverait son camarade insérer nom d’un joueur évoluant déjà dans le club choisi. » L’argument qui est régulièrement cité pour une signature de Marco Reus au Bayern Munich est la présence de Mario Götze, son ami depuis le centre de formation du Borussia Dortmund. Effectivement, il y eût une très grande complicité entre les deux hommes lors du retour de Reus dans la Ruhr, avec leur propre petit rituel à chaque but de l’un ou de l’autre. Et le geste de Götze après la finale de la Coupe du monde est une preuve du lien fort qui unit ces deux joueurs. Mais cette amitié n’est pas assez forte pour justifier un départ du premier pour rejoindre le second. Tout d’abord, Mario n’a pas consulté Marco avant de signer auprès du concurrent bavarois, et avant d’en finir avec cette réunion qui n’aura tenu qu’une seule saison. Ensuite, l’épanouissement de Reus a eu lieu à l’autre Borussia, celui de Mönchengladbach, loin de son ami. Il a créé de nouveaux liens avec d’autres personnes, une émotion lisible sur son visage quand dans les premières journées de la saison 2012-2013 il retrouve son ancien club sous ses nouvelles couleurs. Lors du premier but, il reste totalement stoïque, comme un homme qui a honte de ce qu’il vient de faire. Lors du second, il marque dans un angle quasi-impossible qui finit dans la lucarne opposée et célèbre plus l’acte incroyable qu’il vient de réaliser que le but en tant que tel. Chacun d’entre nous a des amis qui habitent loin, que nous ne pouvons pas voir au quotidien, ceux-ci n’en restent pas moins des personnes proches de nous.
Mais comme toute théorie mérite des preuves, prenons un cas concret : Bastian Schweinsteiger et Lukas Podolski. Les deux hommes se rencontrent dans les sélections de jeunes allemandes et le courant passe tout de suite. Chacun connaît une évolution rapide dans son club, le Bayern pour le premier, Cologne pour le second, et ils participent ensemble à l’Euro 2004. Schweini et Prinz Poldi sont les symboles de la génération montante du football allemand, aux côtés notamment de Philipp Lahm. Le reportage « Deutschland, ein Sommermärchen », version allemande de « les yeux dans les Bleus », suit l’équipe d’Allemagne pendant sa Coupe du monde 2006, et les deux sont les stars de ce reportage, chacun trouvant un nouveau moyen de chambrer l’autre, leurs témoignages se faisant souvent ensemble : le football allemand a sa romance. Podolski ne pouvant pas rester éternellement dans un club qui fait le yo-yo entre la Bundesliga et la 2. Bundesliga, il signe après la Coupe du monde au Bayern de Munich et rejoint son meilleur ami. Mais les choses se passent mal, et les Bavarois connaissent leur version de la catastrophe : ils ne parviennent pas à se qualifier pour la Ligue des champions et doivent se contenter de la Ligue Europa. Après cela, le Bayern se met à faire du shopping et recrute Luca Toni, Franck Ribéry et Miroslav Klose. Podolski est relégué au banc des remplaçants, avant de retourner à Cologne puis de quitter définitivement l’Allemagne pour Arsenal. Malgré l’amitié forte qui le lie avec un des titulaires de son nouveau club, son passage à Munich s’est mal passé, et un départ est inévitable. Si demain, Reus signe au Bayern, son bonheur est loin d’être assuré, surtout que son ami à lui est tout sauf un titulaire indiscutable dans ce club.
S’il arrive à trouver un peu de stabilité physique, Reus peut s’établir comme un de meilleurs joueurs de la planète, et servir son club, quel qu’il soit, et la sélection allemande. Mais pour cela il a besoin d’un environnement stable, où il se sent en confiance. Le Bayern ne peut pas lui donner ces garanties, il serait un joueur parmi tant d’autres, remplaçable, interchangeable. Il se peut qu’il ne reste pas éternellement à Dortmund, même s’il s’agit de sa ville de cœur. Les sirènes de l’étranger pourraient le pousser vers d’autres contrées, comme le Liverpool de son ancien entraîneur Jürgen Klopp ou un Manchester United en perte de vitesse. Mais une chose est sûre : Marco Reus ne signera pas au Bayern Munich.