Douze ans après, Talleres de Córdoba effectue son retour dans l’élite du football argentin. Après avoir connu la faillite et la descente en 3ème division, en un an et demi, Talleres a révolutionné la province de Córdoba et apporté un vent de fraîcheur au football argentin. Focus sur les raisons du succès de l’un des clubs les plus populaires de l’intérieur du pays.
Fondé en 1913, Talleres est, avec Belgrano, l’un des clubs les plus importants de Córdoba, accessoirement la deuxième plus grande ville du pays. Vainqueur de l’ancienne Copa Conmebol (l’équivalent de la Coupe UEFA) en 1999, Talleres est une institution populaire et respectée. Sa descente aux enfers commence en 2004 : mauvaise administration du club, rétrogradation en deuxième division, faillite, crise économique. Le club doit plus de 40 millions de pesos (245.000 euros), est placé sous la tutelle de créanciers et désormais régi selon la loi n°25284, la fameuse ley del fideicomiso. La « T » n’appartient plus aux socios. Le 7 juin 2009, après une énième défaite, cette fois-ci face à l’Atlético Tucuman, l’institution continue de sombrer et descend en troisième division. Pendant près de 5 ans, le géant cordobes sommeille dans des catégories indignes de son rang, ses nombreux supporters s’impatientent et parallèlement le rival Belgrano réalise d’excellentes campagnes en première division. Le club formateur de Javier Pastore doit son salut à un homme : Andres Fassi.
Pachuca, Bielsa et Carlos Slim
En 2014, le club réussit à se débarrasser des tentacules de ses créanciers et redevient la propriété des socios, à l’image de Ferro. De nouvelles élections ont lieu et Andres Fassi est élu à la tête du club. Si Fassi demeure alors inconnu en Argentine, il l’est beaucoup moins au Mexique. Natif de Córdoba, supporter de Talleres depuis son plus jeune âge, il entre dans le monde du football par la petite porte. Il obtient son diplôme de préparateur physique et commence à travailler, ironie du sort, pour Belgrano. Après être passé également par Racing de Córdoba, il rejoint la « T ». Il débarque ensuite au Mexique grâce à l’ancien entraîneur du Racing de Córdoba qui décide de l’enrôler au club de Cobras de Ciudad Juarez. En Amérique centrale, il se lie d’amitié avec Jesus Martinez, un important homme d’affaires mexicain, qui lui finance un projet de vidéos sur l’apprentissage de la préparation physique au niveau professionnel. La vidéo fait un carton et se vend à plus de 80 milles exemplaires au cours de l’année 1993. Marcelo Bielsa, lui-même, alors actuel entraineur d’Atlas contacte Andres Fassi pour le rencontrer. Après 15 heures de discussions intenses sur les méthodes proposées par Fassi, les deux hommes nouent aussi des liens et Bielsa s’inspirera de la vidéo pour la préparation physique de ces joueurs. « Si le Mexique commence à travailler au niveau de la formation des jeunes, à professionnaliser ce domaine, il détiendra un aura important sur le football mondial car le Mexique possède des infrastructures, des dirigeants avec un modèle de direction intelligent et un pouvoir économique important ». Cette déclaration remarquée de Fassi lors d’une émission télévisée l’amènera à Pachuca grâce au gouverneur de l’État d’Hidalgo.
Pachuca est alors une équipe moyenne de deuxième division mexicaine qui n’a jamais gagné un seul titre. En 1994, le club change de dimension, change ses couleurs traditionnelles bleu ciel et blanc sous l’impulsion d’Andres Fassi pour garder le blanc avec un bleu plus prononcé : exactement comme Talleres. Jesus Martinez s’occupe alors de la partie financière pendant que Fassi prend en charge la partie administrative et sportive. En un an, Pachuca ouvre 70 écoles de football dans tout le pays et monte en première division. 10 ans plus tard, le club aura raflé 4 championnats mexicains, 4 Coupes Concacaf et une Copa Sudamericana en 2006, unique titre de la Conmebol pour une équipe mexicaine. Il créé ensuite le Grupo Pachuca, l’un des fonds d’investissements les plus importants du pays propriétaire de nombreux clubs comme Leon au Mexique ou encore Everton au Chili. Le milliardaire Carlos Slim (Telmex) possède d’ailleurs 30% du Grupo Pachuca. L’ouverture du premier « hall of fame » du football et une université entièrement dédiée au football et aux sciences du sport qui accueillent actuellement plus de 3 000 élèves couronnent cet empire.
60 000 personnes en troisième division et 35 000 socios
Revenons-en à Talleres. Fassi, abonné au club depuis toujours, est donc élu par les socios en 2014 avec plus de 70% des voix grâce à sa liste électorale « Talleres Vuelve » (« Talleres Revient » en français) Deux jours après avoir son intronisation, Talleres perd une finale pour la montée en deuxième division face à Gimnasia de Mendoza. Nouveau coup dur pour les supporters lassés de croupir dans les méandres du football argentin. Ils casseront d’ailleurs environ deux milles sièges et de nombreux véhicules à l’extérieur du
stade.
Les débuts à Talleres pour Fassi et son équipe sont chaotiques. En recrutant le technicien Kudelka et en se basant sur la formation de ses jeunes, Talleres commence à sortir la tête de l’eau. La « T’ s’inspire du modèle de Pachuca qui possède pas moins de 47 joueurs séléctionnées dans les équipes nationales de jeunes du Mexique. En un an et demi, Talleres remonte d’abord en Nacional B (deuxième division) puis valide sa montée en Primera grâce à un but à la 94ème minute de Guiñazu et après avoir écrasé la concurrence tout au long de l’année. Les chiffres de Talleres de 2014 à aujourd’hui sont stupéfiants : de nombreux matchs à guichets fermés, soit 60 000 personnes même en troisième division, 1500 socios en 2013, plus de 35 000 aujourd’hui, 24 millions de pesos (1,5 million d’euros) en sponsoring notamment grâce au travail du Grupo Pachuca, 70 écoles de football créées dans la province de Córdoba, 135 000 followers sur Twitter, près de 500 000 sur Facebook, plus encore que Racing, Newell’s ou encore Rosario Central et près de 25 000 connections à chaque match de l’équipe sur Talleres TV (la plupart des matchs du « torneo Federal A » n’étant pas retransmis par des chaînes publiques).
Aujourd’hui, les rumeurs de transferts ne font que confirmer la révolution initiée par Talleres. Certaines pointures sud-américaines comme Cavenaghi, Botta, Barcos ou encore les internationaux péruviens Vilchez et Guerrero résonnent fortement du côté de Córdoba. Le club a réussi à récupérer ses lettres de noblesse. De là à retrouver le toit de l’Amérique du Sud ? L’avenir nous le dira.
Jeques Árabes que quieran invertir en el club mas grande de Córdoba, bienvenidos!!! Talleres el mas grande del interior !!!