Les incidents en marge de la finale de la Coupe d’Italie Naples-Fiorentina (3-1) qui se déroulait à Rome le 3 mai dernier auront fait couler beaucoup d’encre. L’ouragan médiatique presque estompé, le point sur les derniers éléments et les répercussions de ces événements sur les tribunes.
#gennylacharogneadécidé. C’était le hashtag tendance en Italie après que le fameux Gennaro De Tommaso, dit « Genny la charogne » (leader ultra napolitain) a « donné son accord » pour disputer la rencontre. Le colosse de la Curva a écopé d’un daspo (interdiction de stade) de 5 ans, en compagnie d’un autre partenopeo Massimiliano Mantice (3 ans). Le motif ? « Envahissement de terrain et menaces ». « Pour le peu que je le connais, je retiens que c’est un garçon comme tant d’autres et je ne l’ai pas vu commettre de délit à l’Olimpico », nous assure son avocat Lorenzo Contucci qui prépare un recours contre le daspo prononcé. Son représentant légal est bien connu du monde ultra italien, il est d’ailleurs à la pointe du combat contre la tessera del tifoso. Le comble, c’est qu’il est issu de la Curva Sud… de la Roma !
« Gennaro est jugé sans autre élément, il figure dans les premières pages de tous les journaux. Il se sent victime d’une injustice », déplore Contucci. Francesco De Luca, rédacteur en chef du service des Sports au Mattino di Napoli (sans doute le titre qui a le mieux couvert l’affaire) se montre moins complaisant : « C’est un ultra qui, par chance, ne fréquentera plus les stades pour plusieurs années. C’est vrai qu’il a secouru Ciro Esposito (ndlr : le tifoso napolitain gravement blessé) mais il a des antécédents judiciaires et a menacé de ne pas laisser jouer le match en l’absence de nouvelles de Ciro ».
« C’est un daspo injuste, assène de son côté l’avocat. Ce sont les adjoints à la sécurité qui ont été le chercher. Qu’est-ce qu’il pouvait faire d’autre ? Il a en fait évité des désordres en vertu de son rôle de capo. En plus de ça, il est stigmatisé pour le t-shirt « Speziale libero » ( ndlr : du nom d’un supporter sicilien écroué pour meurtre sur un policier). Mais il faut considérer que cela fait partie de la liberté d’opinion : il n’est pas écrit « vive l’assassin de Filippo Raciti » (ndlr : le policier) ! Cela veut seulement dire que celui qui l’a tué serait quelqu’un d’autre ».
Une thèse par ailleurs très répandue dans les tribunes (trois Napolitains ont écopé de la même sanction le week-end suivant pour avoir porté un t-shirt similaire) tant, à l’époque l’enquête fut considérée comme bâclée. En témoignent les soutiens qui affluent de toute l’Europe : Dortmund bien sûr (supporters jumelés), Bayern Munich, Porto et même depuis la Roumanie. Pendant ce temps Le local des Mastiffs et ses alentours, le groupe dont « Genny ‘a carogna » est le capo, ont été fouillés par les forces de l’ordre à la suite des événements liés à la finale. Comme si les autorités n’avaient rien de mieux à faire que de saisir des quantités ridicules de drogues lorsque certains gros bonnets les narguent depuis des années dans une ville gangrenée par la mafia. Une situation dénoncée par Roberto Saviano himself, écrivain et journaliste devenu célèbre pour sa lutte contre la Camorra depuis ton titre phare Gomorra.
Une lettre de menaces à destination de De Tommaso contenant des douilles a même été envoyée au siège du Mattino : « Tes heures sont comptées » ou encore « mort aux ultras ». D’après le rédacteur en chef, une enquête a été ouverte à la préfecture de police pour retrouver l’auteur. Le courrier vise aussi le Napoli et De Laurentiis, qui seraient responsables de la follia ultra. Très critiqué ces derniers jours, le club a répondu de manière ferme à travers un communiqué : « Le SSCN n’a jamais vendu de billets ni passé d’accord avec les ultras ».
Ce que l’on sait de la rixe
On l’oublierait presque mais tout est parti d’une rencontre entre ultras romains et napolitains qui vire au drame avant le match. Daniele De Santis, en compagnie de plusieurs personnes (et non tout seul, contrairement aux premières informations émergentes la semaine dernière) a ouvert le feu contre un groupe de tifosi azzurri. Ciro Esposito, originaire de Scampia (quartier pauvre aux mains de la Camorra), est notamment gravement blessé. Aujourd’hui, il respire seul et son état est stable. « D’après les témoignages que nous avons recueillis, les supporters napolitains ont été agressés par un commando d’ultras de la Roma, et Ciro a été victime d’une embuscade », indique Francesco De Luca.
Il ajoute : « Ciro est un bon garçon. C’est un travailleur », lui qui lave des voitures dans une station service. Son journal rapporte même une expédition punitive de 30 supporters violents de la Roma, parmi lesquels figurait Daniele De Santis dit « Gastone », lançant des pétards sur les cars napolitains. C’est ce qui a déclenché la colère des Partenopei sur l’avenue Tor di Quinto, entraînant la descente d’une dizaine d’ultras du bus. La situation a totalement dégénéré et provoqué la réplique de De Santis, victime par ailleurs de multiples fractures, qui a tiré pour éviter un hypothétique lynchage. La provenance du pistolet constitue toujours un mystère. Ciro Esposito et Daniele De Santis ont été arrêtés tous les deux. Le premier, défendu bénévolement par l’avocat de Maradona, a vite été libéré. L’arrestation pour tentative d’homicide a été confirmée pour « Gastone », le rapport de la préfecture indique « qu’il hurlait autour du bus napolitain lequel comportait aussi femmes et enfants » comme le montre plusieurs vidéos publiées sur le net. À saluer dans cette sale histoire, le beau geste de tifosi de la Lazio qui ont payé deux nuits d’hôtel ainsi que divers frais à la mère de Ciro, toujours hospitalisé à Rome.
Place à la répression
À la suite de ces événements, le Napoli a écopé initialement de deux matchs à huis clos ( réduit à un seul en appel, De Laurentiis fera entrer 10 000 enfants contre l’Hellas Vérone comme l’avait fait la Juve) plus 60 000 euros d’amende (sanction financière ramenée finalement à 120 000 euros avec sursis) et la Curva Fiesole de la Fiorentina d’un match avec sursis et 50 000 euros d’amende. le terrain. Mais là, étrangement, aucun daspo de prononcé… Tout le monde ne bénéficie pas du même traitement médiatique, il est vrai.
Selon nos informations, cela fait des années que De Santis ne vient plus au stade, et il n’est pas impossible que ce soit également le cas des personnes qui l’accompagnaient. Nul besoin de préciser une fois de plus l’inutilité de la tessera del tifoso en ce qui concerne les problèmes liés au supporterisme. Mais le scénario est désormais connu, la grande portée de ces événements va automatiquement déboucher sur des lois répressives et non réfléchies. Cela peut-il remettre en cause les avancées de ces derniers mois sur cette fameuse carte du supporter ? « Absolument, nous répond Me Contucci qui a proposé des modifications. Il suffit d’un événement qui fait couler beaucoup d’encre pour refaire un pas de travers ».
Et ce qui devait arriver, arriva. Dès l’an prochain, des mesures drastiques seront prises avec renforcement du nombre de stadiers et des fouilles plus poussées à l’entrée des stades. Mais le ministère de l’Intérieur va encore plus loin : le daspo pourra être préventif et étendu à des groupes de supporters entiers ! Une annonce qui en a fait sourire plus d’un, et qui montre bien l’amateurisme des responsables de ce sujet, puisque la notion d’interdiction de stade collective a déjà été utilisée cette saison vis-à-vis de 93 tifosi de la Sampdoria s’étant rendu régulièrement et en possession de billets à Livorno pour suivre leur équipe. Une décision ahurissante d’ailleurs annulée par le tribunal, il y a de cela quelques semaines. Parallèlement, la durée maximum d’une interdicton de stade passerait à 8 ans (contre 5 ans actuellement). Les déplacements eux seront encore plus encadrés. Les tifosi de la Roma ne seront d’ailleurs pas admis par crainte de représailles face au Genoa dont la tifoseria est jumelée avec celle de Naples. Ou comment tuer définitivement les parcages, déjà de plus en plus en vides en Italie. Triste conception du football…
Avec Thibaut V.
Merci d’avoir rectifier, car votre article « la vérité sur les incidents Fiorentina Napoli » avec notamment « Rien d’une rixe organisée en somme, mais un acte isolé à distinguer du monde ultra »
Vous contredisiez la presse en apportant votre vérité, mais les faits semblent vous donner tort, le média italien média set dans son article d’hier suite aux déclaration du procureur, semble de plus en plus s’acheminer comme on en parlait au tout début vers une opération préméditée. Pour Ciro Esposito il est toujours à l’hôpital, les médecins ne se prononcent pas sur les séquelles futurs de ses blessures.