Il s’est passé quelque chose de nouveau en Italie cette semaine et il ne s’agit pas du lancement, par une maison d’édition propriété de Silvio Berlusconi, de Il mio Papa, sorte de « Podium » échappé des années 60, relooké et consacré au fan de foot qui dirige l’Eglise apostolique de Rome.
L’évènement le plus notable, concernant le Calcio, est l‘arrestation de trois tifosi de la Juventus, formellement identifiés comme auteurs d’une pitoyable banderole rappelant la tragédie de Superga qui avait provoqué la disparition de toute l’équipe du Torino quintuple champion d’Italie. On peut se réjouir des arrestations mais on peut également en profiter pour voir plus loin et se poser quelques questions.
Au chapitre du positif, un président de club qui condamne immédiatement les chœurs et les banderoles, un club qui fournit les enregistrements vidéo à la justice, enregistrements qui faciliteront les interpellations selon le procureur de la République. Il s’agit là d’un comportement nouveau dans un monde qui a plutôt tendance à s’indigner des méfaits des autres et à occulter les siens propres. Au-delà du comportement, le message aux tifosi est clair.
Au chapitre du négatif, le fait que la loi qui « interdit l’introduction ou l’exposition de banderoles ou écriteaux incitant à la violence ou contenant des injures et/ou menaces », verra peut-être sa première application à l’occasion de cette affaire… d’une loi qui date de 2007 ! Cela dit assez l’état de déliquescence du football italien et de ses institutions.
Une décision en questions
La photo ci-contre donne quelques exemples relevants tous de la loi 41 de 2007.
Aucun n’a donné lieu à des poursuites.
Aucun n’a donné lieu à une condamnation de la part des clubs ou présidents de clubs concernés.
Aucun n’a donné lieu au battage médiatique, aux éditoriaux vengeurs, aux reportages haletants, aux complaintes affligées qui ont rythmé la semaine post « derby della Mole ».
On peut comprendre l’émotion d’un Sandro Mazzola dont le père est mort dans l’accident de Superga, mais les autres, tous les autres qui se sont joints au chœur des lamentations ?
Où étaient ces dernières années leur conscience, leurs indignations, leurs certitudes vertueuses ?
Où les a-t-on lu ou entendu dénoncer l’inacceptable ?
Que feront-ils demain quand une nouvelle banderole souhaitera l’éruption du Vésuve, l’incendie de Milan ou se limitera à exposer un -39 sobrement explicite ?
Est-ce que les caméras tourneront dans les stades ?
Est-ce que la police aura les enregistrements ?
Est-ce que les présidents prendront la parole pour condamner ou bien se tairont-ils comme d’habitude ?
Hypocrisie, acte II
Cesare Prandelli ne se contente pas de porter des lacets arc-en-ciel, il est sélectionneur de son état, apôtre des bons comportements par conviction, et par passion administrateur de code éthique qu’il édicte, modifie, applique ou ignore selon des préceptes connus de lui. Daniele De Rossi en a fait les frais hier et pour un motif valable mais cela ne change rien au fait que la règle serait bien mieux acceptée et comprise si elle s’appliquait toujours et à tous.
Prandelli, comme tout bon sélectionneur, sélectionne. Et en vue de la rencontre amicale contre l’Espagne, le bon Cesare a cru devoir sélectionner un Giorgio Chiellini tout juste revenu de blessure.
Fureur de Conte qui doit gérer 9 matches en mars avec un Barzagli mal en point depuis que Prandelli, déjà, l’a fait jouer plusieurs matchs à la Coupe des Confédérations malgré une tendinite.
Posture outragée du sélectionneur : « Quand un joueur est en condition, j’ai le droit de le convoquer. Hier soir à 23 heures 22, le médecin de la Juventus a envoyé un message à notre médecin disant que tous ses joueurs allaient bien et que Giorgio s’était échauffé ».
Las, le club a reçu la convocation du joueur à 18 heures, bien avant le message au médecin de la sélection. La chose est sans grande importance, sinon que, comme pour un code éthique aux conditions d’applications mouvantes, lorsqu’on s’attache à promouvoir certains principes, lorsqu’on exige certains comportements, lorsqu’on sanctionne certains manquements, on se doit d’être sinon irréprochable du moins assez honnête pour éviter de s’abaisser à mentir en vue de se dédouaner.
L’exemple vient d’en haut, parait-il.
Il serait bon qu’en haut on en prenne note.
Mention spéciale à la sincérité
Il est plaisant, pour rompre avec les hypocrites, de souligner la sincérité d’une déclaration, alors soulignons la très louable sincérité de Walter Mazzari, non pas à propos des arbitres, de la malchance ou du rajeunissement de son équipe qui s’accélère avec le recrutement de Vidic mais à propos de lui-même.
Voici quelques temps, les entraîneurs du Calcio ont voté pour élire le meilleur d’entre eux l’année écoulée. Ces pince-fesses corporatistes pour la plupart importés d’outre-Atlantique n’ont pas grand intérêt mais ils sont l’occasion pour la presse sportive d’obtenir quelques déclarations propres à remplir les colonnes en ces périodes de disette journalistique post mercato.
Or donc, afin de garnir les dites colonnes, on s’avise de demander à l’inventeur du 3-5-2 pour qui il avait voté. Et l’entraîneur de l’Inter, loin de mentir, de louvoyer ou de se réfugier derrière le secret du vote, répond tout tranquillement : « le règlement l’autorise alors j’ai voté pour moi ». On pourra bien sur émettre quelques doutes quant au discernement dont a fait preuve Walter Mazzari en se décernant son propre suffrage mais on ne peut que mentionner et applaudir sa sincérité.