Le 25 septembre 1990, une partie de football amateur en Colombie se transforme en bain de sang. Le fruit d’une lutte entre deux cartels, dont le massacre ne sera qu’un épisode d’innombrables règlements de compte.
C’est un drame du foot quasiment tombé dans l’oubli. Enfin de football, il n’en est pas vraiment question. Même si ce petit terrain champêtre de Colombie, entouré d’une piste d’athlétisme en tartan à six couloirs et d’une petite tribune ombragée, se retrouve bien malgré lui le lieu d’une véritable boucherie. En ce 25 septembre 1990 dans le village d’El Cabuyal vers Candelaria (à une vingtaine de kilomètres de Cali), l’équipe de Los Pachos, domine une équipe amateur spontanée par quatre buts à trois. Les locaux sont dirigés par Hugo Pitillo Valencia et Libardo Perdigón, anciens footballeurs professionnels du Club América de Cali,
Il est 19 heures ce mardi soir-là, alors qu’il restait 15 minutes avant la fin du match, lorsque trois véhicules font irruption dans la ferme attenante. À leur bord, une douzaine d’hommes armés jusqu’aux dents vêtus d’uniformes de l’armée et de la police ouvrent le feu sans distinction sur tout ce qui bouge. Quatre footballeurs périront sur un total de 26 personnes, sans compter les blessés. Hugo Pitillo Valencia et Libardo Perdigón, comme d’autres présents, réussirent à fuir par une sortie dérobée de la ferme sucrière située dans une zone de cultures de cannes à sucre.
La main du tueur à gage d’Escobar
Les investigations démontreront que cette propriété voisine de 56 hectares appartenait à Francisco Herrera, considéré par les autorités locales comme le n°4 du fameux cartel de Cali. La piste s’avère bonne. Il s’agit bien d’un énième règlement de comptes. Le responsable de cette tuerie ? Le gang rival, le cartel de Medellin. Le donneur d’ordre n’a rien non plus d’un second couteau : Brance Munoz Mosquera dit «Tyson», tueur à gage de Pablo Escobar. Pourquoi donc un tel bain de sang ? Gilberto Rodríguez et Helmer Pacho Herrera, chefs du cartel de Cali, étaient supposés assister au match. L’histoire ne dit pas si tel était le cas.
Les désaccords entre les chefs des deux cartels avait éclaté pour la distribution de cocaïne à New York, d’abord. Pour les méthodes terroristes utilisées par Escobar pour tenter de soumettre l’État colombien, plus tard. Et enfin, à cause d’une histoire de femmes selon le témoignage de l’indicateur Jorge Salcedo dans le livre En la boca del lobo. Le travail des enquêteurs permettra d’appréhender quatre hommes du commando dans une ferme à heure de route au sud dans le village de San Rafael (municipalité de Santander de Quilichao).
L’arsenal découvert laissera peu de doute sur leur implication : 11 fusils R15, 4 mitraillettes mini-Uzi, 3 fusils AUG avec viseurs télescopiques, 2 fusils galil, des grenades et de nombreux uniformes camouflés de l’armée et de la police. Le tout en plus d’une importante somme d’argent en numéraire. La guerre des cartels avait commencé deux ans plus tôt, le 13 janvier 1988, avec l’explosion d’une voiture piégée devant l’immeuble de Pablo Escobar à Medellin. Les épisodes sanglants ne cesseront de se multiplier, les victimes seront nombreuses. Et trop souvent innocentes, comme celles venues simplement voir ou jouer un match de football.