Un rectangle vert, deux cages, quelques lignes blanches tracées et une tribune. Voilà le foot dans son plus simple appareil. Pourtant, certaines enceintes sont devenues, au fil des années, des lieux qui ont marqué, pour le meilleur et pour le pire, la mémoire des footeux du monde entier. Présentation de cinquante d’entre elles. Aujourd’hui : Saint-Étienne, Santiago, Téhéran, Bruxelles et Hambourg.
30. Stade Geoffroy-Guichard, Saint-Étienne (ASSE)
En France, comme en Angleterre et en Allemagne, c’est dans les villes ouvrières que le foot est devenu grand. Pas étonnant alors que le stade le plus effervescent du pays soit le « Chaudron » de la ville de Manufrance. Pour tout Français ayant connu les années 70 et 80, Geoffroy-Guichard, c’est le stade mythique des Rocheteau, Bathenay, Larqué et Piazza. Et un apport inégalé à la culture foot de ce pays, avec un chant de supporters qui a réussi l’exploit d’être connu par tous. Côté tribunes, le stade reste intimement lié aux Magic Fans et aux Green Angels, les deux principaux groupes ultras qui placent les tribunes du Chaudron parmi les plus bouillantes de France.
29. Estadio Nacional de Chile, Santiago (Universidad de Chile / Équipe du Chili)
Une finale de Coupe du monde, cinq finales –bientôt six – de Copa América, onze finales de Copa Libertadores et deux de Copa Sudamericana. Un feu d’artifice de matchs de haut vol qui auraient pu faire rentrer le plus grand stade chilien dans la légende de football. Tout comme les matchs d’Universidad de Chile, géant national qui y joue ses matchs à domicile.
Hélas, ce n’est pas le foot qui a fait la triste réputation du stade chilien. En 1973, entre septembre et décembre, quarante mille opposants au régime militaire d’Augusto Pinochet sont passés par ce stade, transformé par le gouvernement d’extrême-droite en « centre clandestin de détention politique et de torture ». Ce stade, où se jouait quelques mois plus tôt la finale de la Copa Libertadores entre Independiente et Colo-Colo, s’est transformé en un clin d’œil en camp de concentration à ciel ouvert. Le plus grand d’Amérique. Une tache indélébile sur la fête sportive que toutes les finales internationales ne permettront pas d’effacer…
28. Stade Azadi, Téhéran (Persepolis / Esteghlal / Équipe d’Iran)
On cite régulièrement Barça-Real, Boca-River, ManU-Liverpool ou même Galatasaray-Fenerbahçe parmi les meilleurs derbys du monde. C’est oublier le Surkhabi, le derby iranien, entre le Persepolis et l’Esteghlal, les deux équipes résidentes du stade Azadi de Téhéran. Avec 90.000 places, c’est le stade qui accueille le plus de supporters au monde pour un derby. Dans un pays qui, bien que peu présent sur les radars des footeux européens, a une vraie passion pour le foot. Nombreuses sont les équipes asiatiques qui pourront en témoigner…
27. Stade du Heysel, Bruxelles (Équipe de Belgique)
Finale de la Coupe d’Europe des clubs champions. Liverpool-Juventus. Quand le match commence, les hooligans anglais ont assailli une tribune neutre, provoquant un mouvement de foule. Tout un virage du stade est en train de vivre une tragédie qui fera 39 morts et plus de 600 blessés. Pourtant, l’arbitre, ainsi que les capitaines Gaetano Scirea et Phil Neal, font comme si de rien n’était. The show must go on. La Juve est sacrée championne d’Europe grâce à un penalty de Platini.
Avec ce drame, le premier de grande ampleur dans le football européen, débute une politique de lutte contre le hooliganisme dans tous les pays du continent. Qui a sans doute permis d’éviter de nombreuses morts, mais qui a aussi marqué le début d’une défiance généralisée vis-à-vis des supporters.
26. Millerntor-Stadion, Hambourg (FC Sankt Pauli)
On ne présente plus le FC Sankt-Pauli, le club d’extrême-gauche de Hambourg, qui porte jusque dans son règlement les valeurs antifascistes et antiracistes. Dans la ville portuaire où transitent des millions d’euros de marchandises par jour, le stade Millerntor est le refuge des exclus. Squatteurs, drogués et sans-le-sou qui rôdent dans le quartier délaissé où il est construit peuvent toujours s’y rendre, à la faveur de tarifs très faibles – parfois moins de 10 euros.
Rares sont les clubs qui luttent contre le foot-business. Sankt-Pauli en fait partie. Son président, l’excentrique Corny Littmann, s’est battu pour conserver ces places bon marché et debout. Les bien nommées « tribunes populaires ». Et le stade continue à être ce qu’il a toujours été censé être : un lieu populaire. Chapeau bas.