C’est avec la bénédiction du préfet de la ville de Rennes que les ultras parisiens ont effectué un « contre-parcage » (assister au match en dehors du parcage officiel), ce vendredi soir, en marge de Rennes-PSG. Une première, alors que la politique de gestion des supporters est essentiellement répressive, qui en appelle d’autres ?
« En accord avec le Stade Rennais et après discussion avec les représentants de ces supporters, la préfecture a autorisé un contre-parcage en tribune ‘Ville de Rennes’ ».
Ceci n’est pas un arrêté préfectoral, mais bel et bien un courrier officiel de la préfecture d’Ille-et-Vilaine adressé aux responsables de l’ADAJIS (Association de Défense et d’Assistance Juridique des Intérêts des Supporters) autorisant les ultras du PSG à organiser un « contre-parcage », alors que le PSG leur prive toujours l’accès en tribune visiteurs malgré les remontrances de la CNIL. Une décision surprenante d’autant que le dialogue avec les autorités est quasi inexistant. En France, la plupart des déplacements du PSG sont précédés d’arrêtés préfectoraux qui limitent voir interdisent l’accès au stade aux supporters contestataires parisiens.
Négociation à l’amiable
Cette fois-ci, le préfet de la ville de Rennes refuse de s’aligner sur la politique essentiellement répressive du PSG et de la DNLH (Division Nationale de Lutte contre le Hooliganisme). Deux semaines avant Rennes-PSG, il prend les devants. « Il nous a contacté pour discuter du déplacement, raconte Michaël Tommasi, président de l’ADAJIS. Le préfet voulait éviter les débordements et nous, on voulait assister au match ». Les deux interlocuteurs posent alors leurs conditions : « Certains ont réussi à obtenir des billets dans le secteur visiteurs, d’autres dans des endroits opposés, j’ai donc exigé qu’on puisse tous rentrer et se regrouper dans une partie du stade ». Requête acceptée. En échange, la préfecture d’Ille et Vilaine leur transmet des consignes de sécurité strictes. Cortège d’avant-match, chants injurieux, tambours, mégaphones et banderoles sont notamment interdits.
Des mesures qui vont à l’encontre de la culture ultra. « Leurs conditions étaient, certes, très strictes mais c’était ça ou l’on restait dehors», justifie Michaël. « C’est la première fois qu’on négocie avec un préfet, il fallait que cela se passe bien ». Et le contre-parcage s’est bien passé. Frédérique Camilleri, sous-préfète d’Ille-et-Vilaine confirme : « Les 150 ultras se sont rendus au point de rendez-vous, comme prévu, on les a fait rentrer dans le stade, il n’y a pas eu de provocation, d’insulte ou de banderole injurieuse. Chacun a respecté les termes de notre engagement ». Coté parisien, l’ambiance était eu rendez-vous (voir vidéo). Les groupes contestataires, Le Combat Continue (LCC), Nautecia, Liberté Pour les Abonnés (LPA), Lista Nera Paris (LNP) Microbes, K-Soce Team et Boulogne 1978 étaient aussi de la partie.
Les dirigeants du PSG « avaient l’air surpris »
Négocier avec les ultras au lieu d’interdire leur déplacement ? Pour Frédérique Camilleri, c’est une question de bon sens : « Il n’existe pas de rivalité entre Rennais et Parisiens. En 2013, on avait publié un arrêté préfectoral limitant la venue des supporters parisiens, il a été suspendu par le tribunal administratif ». C’est aussi une question de logistique : « Lorsqu’ils arrivent dispersés dans le stade, il faut aussi disperser nos forces de sécurité ». Regrouper les ultras a donc permis de prévenir d’éventuels débordements. À Nantes, en mai dernier, les ultras parisiens s’étaient retrouvés éparpillés dans une tribune familiale. Ils avaient été replacés en parcage visiteurs après un échange musclé avec les forces de l’ordre, au milieu des enfants.
Par ailleurs, Frédérique Camilleri assure ne pas avoir reçu de pression de la part du PSG pour interdire l’accès au Roazhon Park à ces supporters jugés indésirables : « On a eu une réunion de sécurité avec la direction du PSG, on leur a expliqué qu’on allait accueillir les ultras. Les dirigeants ont pris acte, ils avaient l’air surpris ».
Le PSG fait la sourde oreille
Côté ultras, on applaudit l’initiative. « Le directeur de la sécurité du Stade Rennais est même venu nous parler, je suis resté sur le cul (sic) ! », s’étonne Michaël. Le président de l’ADAJIS souhaite que cette initiative soit renouvelée dans les autres stades où se déplace le PSG : « Favoriser le dialogue est exactement le but de notre association. On a montré qu’on était des interlocuteurs crédibles, et pas des voyous, comme certains voudraient le faire croire ».
C’est avec 3 points (0-1) et une lueur d’espoir que les ultras parisiens rentrent de Rennes. L’espoir que dorénavant, les préfectures compétentes des villes où se déplacera le PSG favoriseront la concertation à la répression. À défaut de pouvoir renouer un dialogue avec le club.