Le 19 janvier dernier, Jorge Sampaoli et la fédération chilienne de football parvenaient à trouver un accord pour mettre un terme au contrat du sélectionneur chilien. Six mois après l’obtention de la première Copa América de l’Histoire du Chili en juillet dernier, pourquoi Sampaoli a-t-il voulu mettre un terme à sa fonction de sélectionneur ? Explications.
12 novembre 2015. Le Chili rencontre la Colombie. Sans Marcelo Diaz, la Roja décroche un piètre match nul (1-1), la faute aux imprécisions techniques et à une pénible inefficacité devant le but. Ce jour-là, Sampaoli s’était montré auto-critique : « Le résultat est juste, ils ont été supérieurs en seconde mi-temps. Nous avons manqué de justesse dans le dernier geste. Il a manqué tout ce que le Chili fait de mieux : soumettre les adversaires à notre football. » Puis, interrogé sur la situation de Sergio Jadue, le président de la fédération chilienne de football visé par l’enquête portant sur la corruption au sein de la FIFA, le sélectionneur chilien avait admis son ignorance : « Je n’ai pas eu connaissance de ce qui se passe, personne ne m’a informé sur le sujet. » La sélection de Sampaoli est à l’image de sa présidence : groggy.
6 jours plus tard, la nouvelle tombe : Sergio Jadue démissionne de son poste de président de la fédération chilienne de football. L’ex-président a reconnu sa culpabilité face aux charges retenues contre lui par la justice américaine et a accepté de coopérer à l’enquête sur le scandale de la corruption secouant la FIFA en échange d’une peine réduite. L’ancien dirigeant qui avait prétexté des vacances en famille de plusieurs mois pour justifier son départ vers les États-Unis a reconnu devant la justice américaine son implication dans l’affaire des pots-de-vin reçus par la CONMEBOL (Confédération sud-américaine de football) en lien avec l’attribution des droits télévisés de plusieurs éditions de la Copa América. Le vaste scandale de corruption autour de la FIFA a touché la majorité des hauts dirigeants de la CONMEBOL et de ses dix fédérations. C’est le début d’un long chemin de croix pour la Roja.
La gestion compliquée du départ de Beccacece
Avant ce coup de tonnerre, Sampaoli avait demandé une revalorisation salariale à son président. Une requête accompagnée d’une clause stipulant que cette revalorisation devait être exemptée d’impôts. Et cette situation, Sampaoli voulait la régler avant le départ de la sélection pour la rencontre face à l’Uruguay, match comptant pour les éliminatoires à la Coupe du monde 2018. Nous sommes le 17 novembre. C’est à l’aéroport de Santiago que le sélectionneur recevra satisfaction. Mais si les dirigeants (Jaime Baeza, président intérimaire et Antonio Martinez, personne la plus proche du sélectionneur au sein de la fédération) avaient momentanément gagné la paix avec Sampaoli, son avenir restait en pointillés.
Car au sein de la nouvelle incertitude qui règne dans les arcanes de l’ANFP, Jorge Sampaoli est très mal à l’aise, et les raisons sont multiples. L’inconnu autour de la présidence de l’ANFP jusqu’aux élections du 4 janvier d’abord (1), le démembrement de son staff technique ensuite (2) avec les départs de son adjoint, Sebastian Beccacece (on y reviendra) ainsi que de Nicolas Diez et de son analyste vidéo, Francisco « Paqui » Meneghini, déjà dans le staff sous l’ère Bielsa. Et puis Sampaoli est inquiet des éventuelles sanctions contre le Chili suite au scandale de la FIFA (3). Sans la présence de Jadue pour répondre à ses interrogations, Sampaoli est esseulé et l’ANFP ne sait pas quoi lui répondre. À l’époque déjà, sa décision de partir est latente et son entourage le sait bien.
Comme après toute victoire d’une grande compétition, pour certaines figures du groupe, une telle aventure désigne le point final d’une carrière, quelle qu’elle soit. C’est le cas du fidèle adjoint de Sampaoli avec qui il travaillait depuis 13 ans, Sebastián Beccacece. Ce dernier souhaite désormais suivre sa propre voie, celle d’entraîneur à part entière. Et il a déjà trouvé un club : l’Universidad de Chile. Un départ qu’il annonce par écrit le 19 novembre à l’ANFP (soit au lendemain du match face à l’Uruguay) et qui devait être effectif le 30 novembre. Problème, alors que l’accord était entériné entre la fédération (alors présidée par Jadue) et Beccacece dès le mois d’août 2015, l’exil de Jadue a tout changé. Le 23 novembre, l’ANFP lui annonce qu’elle n’accepte pas son départ au prétexte du non respect du délai de 30 jours d’anticipation. D’autre part, sa clause de départ s’élève à 2,3M$ et l’adjoint ne peut évidemment pas la payer. Beccacece accepte donc de travailler jusqu’au 19 décembre pour respecter ledit délai et pour « éviter un conflit médiatique inutile » selon le procès-verbal de sa procédure à l’encontre de l’ANFP. Pour Beccacece, son cas est « utilisé par l’ANFP pour occulter la grave crise institutionnelle qui affecte l’institution. » De son côté, Sampaoli demande à l’ANFP de respecter l’accord tacite qu’il y avait eu préalablement entre Sergio Jadue et son adjoint.
Le court intérim de Juan Manuel Lillo : point de discorde entre l’ANFP et Sampaoli
C’est dans cette ambiance pesante que Sampaoli, toujours aussi perfectionniste, tente de mettre tous les atouts de son côté pour rendre sa sélection la plus compétitive possible. Dans cette quête, le sélectionneur fait appel à un homme connu pour sa science du jeu et reconnu pour un paradigme en particulier : le jeu de position, domaine dans lequel le Chili doit et veut progresser. Là aussi, même situation, un accord de principe a été trouvé entre Sergio Jadue et Jorge Sampaoli pour que Juan Manuel Lillo exerce sa mission de trois mois en tant que conseiller technique du Chili pour encadrer les sélections de jeunes (U15, U17, U20) avec le Mondial U17 en point de mire et le Sudamericano des U15. Mieux, les deux hommes se sont entendus pour que Lillo devienne le nouveau directeur technique des sélections de jeunes après le 31 décembre 2015.
Mais là aussi, problème, l’arrivée de Lillo ne fait pas consensus. Au fil des semaines, au sein de la fédération, on a commencé à voir d’un mauvais œil l’idée de Sampaoli. La raison serait avant tout d’ordre économique. Garder Lillo serait un poids économique non anodin d’autant que ses prétentions salariales sont considérées comme excessives par la nouvelle direction (il est question de 30.000$ mensuels). Celle-ci voudrait reconsidérer l’accord puisqu’il n’était pas écrit mais oral. Encore une fois.
Cependant, le point de discorde pourrait également être tout autre. En effet, l’idée de Sampaoli de faire de Lillo le directeur technique des sélections de jeunes ne plait pas du tout à l’ANFP qui voudrait attendre le 4 janvier (date des élections) pour statuer. La raison ? Un Argentin était déjà à la tête des jeunes sélections chiliennes, Hugo Tocalli, du 11 juillet 2013 au 16 mars 2015, et les sélections de jeunes n’ont jamais eu aussi peu de résultats. Pour la fédération chilienne, la faute revient à « son ignorance de l’idiosyncrasie du football chilien. » Enfin, dernier argument avancé, la nomination de Lillo pourrait s’avérer être trop hâtive eu égard au fait qu’il n’y a aucune compétition majeure pour les sélections de jeunes chiliennes en 2016. Mais Sampaoli lie son avenir à celui de son nouvel ami. « Les conditions actuelles ne me permettent pas d’avoir les garanties nécessaires pour continuer le projet à la tête de la sélection », énonce-t-il à son entourage. Des propos relayés par le quotidien El Mercurio. Ironie de l’histoire, la fédération n’a pas payé le salaire dû à Lillo pour le mois de novembre (30.000$ donc).
Pourtant, une des critiques majeures adressées à Sampaoli durant tout le long de son mandat a été son attention portée davantage sur les A que sur les sélections inférieures. La justification de Sampaoli est simple, il dédie tellement de temps à son travail avec les A qu’il lui était impossible de dédier son temps aux sélections de jeunes. Alors après l’obtention de la Copa América, Sampaoli a admis que le moment était venu de diviser son temps de travail. Ou, du moins, d’accorder plus de temps aux jeunes. De là est venue l’idée de faire appel à Lillo.
Les contrats du staff technique révélés au grand jour : soupçons d’évasion fiscale
Mais la raison principale de son départ, et qui a occupé la plus grande part de sa réflexion, c’est la divulgation de son contrat dans la presse. Lors de toutes ses sorties médiatiques et par le biais de ses communiqués, Jorge Sampaoli a largement évoqué son abjection face aux méthodes utilisées pour salir son nom, et notamment cette révélation au grand public du contenu de son dernier contrat.
« Jamais je n’aurais imaginé qu’on puisse en si peu de temps détruire aussi facilement l’image d’une idole qui a tant donné au football chilien. Je suis franchement déçu et dans ces conditions, je ne peux pas continuer à diriger la sélection alors que mon esprit est ailleurs, a-t-il déclaré sur radio Agricultura le 11 janvier dernier. On m’a décrit comme quelqu’un d’intéressé seulement par l’argent. Je n’ai pas eu les émoluments de Bielsa ou de Berizzo. J’ai reçu des appels d’amis et de la famille à l’étranger qui me demandaient si j’étais mêlé à ces affaires troubles. Je ne pouvais croire qu’on me demande cela à moi, l’entraîneur qui a connu le plus de succès dans ce pays. C’est de la folie. Mon contrat a été publié dans un journal. Cela a-t-il était fait à Bielsa ? J’ai dit à l’éditeur que cela m’avait blessé. Il a cassé la confidentialité de mon contrat et m’a exposé à l’opinion publique en faisant de moi un personnage uniquement motivé par l’argent. Sincèrement, je ne sais pas quoi dire de plus pour que vous compreniez à quel point je suis blessé par cette situation qui m’a vu exposé à des enquêtes rigoureuses comme si j’étais impliqué dans ces affaires de corruption. »
À quoi Sampaoli fait-il allusion ? Selon une enquête du Centre d’Investigation Journalistique chilien (CIPER), il est mentionné dans son contrat du 16 novembre que ses primes liées aux droits à l’image ainsi que les primes de la Copa América (soit près de 6M$) ont été placés dans des paradis fiscaux et plus spécifiquement pour 3 sociétés offshore des Iles Vierges Britanniques. La fédération s’est vu obligé de régulariser la situation en payant près de 500.000 dollars au service des impôts puisque son contrat ne prenait pas en compte les primes concernées. Également, tel que le rapporte le média alternatif The Clinic Online, Sampaoli a toujours fonctionné avec des contrats parallèles. Une pratique courante dans le football actuel due à l’importance des sommes lors des transactions.
Des accusations que Sampaoli a encore réfuté lors de son dernier communiqué de presse. « S’est déclenchée une situation nouvelle pour moi, avec de fausses informations, mon contrat a été divulgué et cela a porté atteinte à mon image. Il a été annoncé que je détenais des comptes dans des paradis fiscaux, cependant, ces fausses accusations doivent être clarifiées. Ces informations m’ont fait passer pour quelqu’un qui fuit les impôts mais les organismes officiels ont démontré la fausseté de ces informations. On a tenté de me faire mal. »
Comment Sampaoli a-t-il vécu la nouvelle présidence à la fédération chilienne de football ?
La rupture est consommée et semble irrémédiable. Avant la tenue des élections, rien ne semble aller pour le mieux pour Jorge Sampaoli. Le sort semble s’acharner. Le sélectionneur a perdu sa mère dans la nuit du 31 décembre 2015 au 1er janvier 2016, décédée d’une hypertension pulmonaire après avoir été hospitalisée et ce à trois jours qui allaient (re)définir son destin. Mais jusqu’au bout, le sélectionneur s’est scrupuleusement intéressé aux élections puisqu’il n’était pas au Chili la plupart du temps, mais à Casilda (en Argentine), auprès de sa famille. Un dirigeant de la Fédération confiait : « Il était en contact quotidien avec nous via WhatsApp, non pas pour savoir qui allait l’emporter mais pour la transparence du processus électoral. » Si sa décision de quitter le Chili n’était pas préméditée, Sampaoli voulait entériner la poursuite ou la fin de son aventure le plus rapidement possible. Son ami et biographe, Pablo Paván déclarait ainsi à La Tercera : « Je suis allé présenter mes condoléances suite au décès de sa mère, il était très affecté. J’ai eu la chance de lui parler de ce qu’il se passait au Chili et il m’a dit qu’il savait à peine qui allait devenir le prochain président. S’il pouvait se réunir avec le nouveau président le jour le même de l’élection, il l’aurait fait. » Et c’est ce qu’il fera.
Le projet de Sampaoli
D’autant que le sélectionneur tenait particulièrement à présenter son projet à la nouvelle direction, comme nous vous l’annoncions. Ce projet était simple et axé autour de la discipline de son groupe et de la formation du football chilien avec le Mondial 2022 en ligne de mire. Sampaoli savait que la génération dorée menée par Alexis Sánchez, Vidal, Bravo, Medel arrivait à son terme. Selon La Tercera, il aurait même fait part à son entourage que la sélection n’aurait aucune chance de se qualifier pour la prochaine Coupe du monde (2018) si elle se reposait seulement sur les joueurs précités. Dans son projet, Sampaoli voulait ainsi implanter au sein de la sélection des membres des Espoirs qu’il comptait intégrer dès à présent. D’ailleurs, un joueur lui plaisait particulièrement, Felipe Mora (22 ans). L’attaquant était voué à être appelé constamment. On comprend alors mieux la volonté d’un rapprochement entre Lillo et la fédération compte tenu du peu de temps que Sampaoli pouvait accorder aux U17 et aux U20. L’arrivée de Lillo était clé.
Aussi, le niveau affiché ces dernières semaines par la sélection préoccupait Sampaoli après que celle-ci n’ait glané qu’un seul point lors des deux derniers matchs face à la Colombie (1-1) et l’Uruguay (0-3) dans la course à la qualification à la Coupe du monde 2018. Pour remobiliser ses troupes, Sampaoli prévoyait d’être encore plus exigeant lors des mises au vert. L’idée était simple : que ces mises au vert soient « totales » dès lors que les joueurs mettaient les pieds au Chili. Et étant donné que les installations du centre d’entraînement (Juan Pinto Durán) ne sont pas adéquates de son point de vue, il aurait prévu de demander à la direction de prévoir ces mises au vert dans un hôtel ou un complexe pour de meilleures conditions de travail. Évidemment, cela demandait des dépenses supplémentaires dans la logistique de la sélection. Mais pour Sampaoli, ces changements étaient fondamentaux.
De longues négociations
Le projet ainsi posé, en dehors du gala FIFA Ballon d’Or, Sampaoli n’attendait qu’un événement : l’annonce du nouveau président de la fédération chilienne de football. Nous sommes le 4 janvier, il est 13 h 30 heure locale, Arturo Salah est élu. Quelques heures après l’officialisation, Sampaoli arrive dans les bureaux de l’ANFP pour sa première rencontre avec le nouveau président de la fédération. Et le sélectionneur n’a pas encore l’idée de démissionner. « Ce fut un entretien très constructif, une réunion de prise de connaissance et d’écoute vis-à-vis de ses inquiétudes. (…) Il a évoqué ses inquiétudes mais il ne nous a rien demandé », déclare Salah après leur entrevue. Sampaoli lui a largement parlé de la divulgation publique de son contrat, de ses émoluments et de ses comptes dans des paradis fiscaux parce que la situation l’a profondément touchée. Plus surprenant, Sampaoli aurait également évoqué sa lassitude face à l’indiscipline grandissante de certains de ses joueurs après l’obtention de la Copa América. Un relâchement qui s’est vérifié à travers les résultats.
6 janvier. Après leur seconde rencontre qui aura duré deux heures, la presse locale se veut optimiste. « Aujourd’hui, Sampaoli est plus proche de poursuivre avec la Roja », titre El Mercurio. Les deux hommes se seraient rapprochés sur certaines « positions » et l’Argentin aurait même accepté de diriger le Chili jusqu’à la Copa América de juin. La fin du tournoi coïnciderait avec l’ouverture du marché en Europe. Mais ces « rapprochements » ne concernent pas sa continuité avec le Chili. Il n’y a toujours pas d’accord. Simplement, des certitudes naissent : Arturo Salah souhaite que Sampaoli respecte son contrat qui court jusqu’en 2018 et le sélectionneur ne compte pas payer d’indemnité si son départ est accepté. « Nous avons toujours dit que nous voulions continuer avec Sampaoli. Nous lui avons donné toutes les conditions, notre soutien et la tranquillité. Son travail a été très positif et la gestion sportive a été excellente. Il est sous contrat et ce que nous voulons, c’est qu’il continue avec nous », déclarait alors Arturo Salah. C’est dans ce flot d’informations contradictoires qu’on apprend le même jour que pour avoir organisé la Copa América, l’ANFP est endetté à hauteur de 12M$.
8 janvier, la troisième réunion entre les deux hommes est la plus longue à laquelle ils se sont adonnés. Elle aura duré 5 heures, de 12 h 20 à 17 h 20. Il n’est plus question de négociations sur la continuité du sélectionneur au Chili mais de négociations sur sa clause de départ. Car son départ est acté. C’est décidé. Sampaoli souhaite mettre un terme à son contrat sans payer la moindre indemnité. Les fans qui l’ont accueilli sous les insultes plus tôt dans la journée le savaient. Sauf que s’il veut mettre un terme à son contrat, Sampaoli doit payer une somme avoisinant les 6,3M$, soit la somme de ses salaires jusqu’au terme de son contrat (2018). Une somme qu’il ne peut évidemment pas payer. « Il me faudrait braquer une banque », déclare-t-il alors. Sampaoli préfère ainsi négocier son licenciement, et au terme de plusieurs jours d’âpres négociations, l’ANFP et Sampaoli se mettent d’accord le 19 janvier autour de 3,4M$ d’indemnisations. Le contrat du sélectionneur est résilié et ce dernier doit renoncer à ses primes de victoire lors de la Copa América (soit 2,4M$). Mais pas seulement. Il sera redevable d’une somme de son prochain contrat (1M$) après avoir signé une reconnaissance de dette alors que les deux parties étaient prêtes à s’engager dans une véritable bataille juridique. « Je les ai légitimement gagnées, il est hors de question de les rendre. C’est l’argent de ma famille, de mes enfants. Ce n’est pas négociable », avaient-ils pourtant juré en évoquant ses primes de la Copa América lors de sa conférence de presse du 13 janvier. Mais il a dû se rendre à l’évidence et partir sans égratigner son image. Essayer.
Le lendemain, une source proche de la présidence de la Fédération fait savoir que Jorge Sampaoli avait décidé de quitter la sélection dès leur première rencontre, le lundi 4 janvier. Mais son départ ne s’explique pas pour des raisons footballistiques ou économiques. Comme il le confie dans son dernier communiqué de presse, selon lui, l’aspect humain l’a rendu illégitime pour poursuivre sa fonction de sélectionneur du Chili. Un sentiment qu’il livrera à moult reprises pour Fox Sports, El Mercurio et AS.
« Ce qu’il se passe au Chili, c’est de la désinformation totale. Tout sera clarifié au moment venu. Ce n’est pas une question de clause ou non. L’ANFP sait très bien de quoi il s’agit et cela concerne un préjudice personnel. Il ne s’agit pas d’argent mais d’état d’esprit. » (AS, le 11 janvier) (…) « J’ai expliqué que je ne suis pas prêt à poursuivre dans un endroit où je ne suis pas autant respecté qu’avant. Si je vois qu’1% ne me respecte plus, je m’en vais. Jamais je ne pourrai dire que je suis otage d’un pays où vit ma famille. Je vais continuer de vivre ici parce que le temps me donnera raison. Il m’est impossible de me défaire de ce contexte car chaque jour, de nouvelles choses apparaissent et ça ne cesse jamais. Ça fait un un mois et demi et ça ne s’arrête pas. Aujourd’hui, ils me persécutent jusqu’à mon domicile comme si j’étais un délinquant. Je ne veux pas passer pour une victime. Je suis reconnaissant envers ce pays mais aujourd’hui, je suis dans un contexte très difficile. Quand je veux me relever, on me frappe de nouveau. » (FoxSports, le 13 janvier) (…) « L’idée est qu’à partir du moment où des faits qui n’ont rien à voir avec le football rentrent dans le domaine public, ça complique les choses du point de vue humain plus que footballistique. J’ai dit à la nouvelle direction que je n’étais pas à l’aise avec la situation telle qu’elle est et que l’idéal était qu’il valait mieux ne plus gâcher nos énergies pour continuer. (…) Quitter la sélection est la meilleure chose à faire pour moi et le football chilien » (El Mercurio, le 11 janvier).
Sampaoli vit toujours au Chili
1142 jours après avoir signé son contrat comme sélectionneur du Chili, six mois après avoir remporté la Copa América, nous sommes le 19 janvier et plus rien ne relie Sampaoli à la Roja. Il quitte la sélection en étant le sélectionneur le plus glorieux de l’Histoire du pays. Et pourtant, tout le lie au Chili. « Je peux vous dire qu’il va rester au Chili. Il ne pense pas à quitter Santiago. Aujourd’hui, il est à Rancagua et il a encore des attaches pour ce pays », avait déclaré l’avocat de Sampaoli, Fernando Baredes, à La Tercera à l’issue des négociations avec la fédération.
Actuellement, selon le quotidien La Cuarta, Sampaoli serait reclus dans son domicile à Lo Barnechea et passerait son temps à rendre visite à sa compagne à Rancagua, à promener ses chiens et à jouer au tennis. « Maintenant, je vis comme une personne normale, comme n’importe qui. Je veux juste vivre en paix » a-t-il confié.
L’issue de son aventure avec le Chili ne fut pas celle idéalisée, mais son successeur entamera la sienne de la meilleure façon qui soit. Parce que dès lors qu’il s’agit de football, Sampaoli ne déçoit jamais. Parallèlement à tout le brouhaha institutionnel, Sampaoli et ses collaborateurs continuaient à se rendre au centre d’entraînement, à Juan Pinto Durán, dans la préparation des matchs et dans la recherche d’informations des joueurs chiliens susceptibles d’être convoqués en vu des deux prochains matchs face à l’Argentine et au Venezuela de mars prochain. Un de ses assistants affirme d’ailleurs que l’Argentin a laissé au centre d’entraînement « une grande partie de son matériel » dont pourra profiter son successeur, Juan Antonio Pizzi. Une façon comme une autre de remercier le Chili.