Connu pour ses commentaires lyriques et passionnés, le journaliste et commentateur argentin, Matías Barzola, nous a ouvert les portes de la plus grande radio sportive de la province de Córdoba (Argentine), spécialisée dans le football cordobés, Radio Sucesos. Disponible et sympathique, ce fut l’occasion pour La Grinta d’aborder entre autres son parcours atypique et le football argentin.
Bonjour Matías, pour commencer peux-tu te présenter à nos lecteurs qui ne te connaissent pas ?
Matías Barzola : Bonjour. Je m’appelle Matías Barzola et il faut savoir que je n’ai pas eu un parcours « totalement normal » si je puis dire. Avant d’être journaliste j’étais boulanger. Je sais, c’est assez improbable (il rigole). Ensuite, je suis devenu journaliste une fois que Radio Sucesos m’a contacté.
Cela paraît en effet assez fou. Comment Radio Sucesos t’a contacté et comment passe-t-on de boulanger à journaliste et commentateur sportif ?
M.B. : Au départ, des amis m’ont contacté car ils voulaient monter une radio pour commenter les matchs du football cordobés trop peu suivi à leurs goûts. J’ai accepté tout en gardant la boulangerie car à la base ce n’était qu’un passe-temps et non mon métier. Par la suite, sûrement satisfait de ce que je faisais en tant que commentateur, Radio Sucesos m’a contacté et j’ai commencé à travailler pour eux.
Il s’agit de la plus grande radio sportive de Córdoba…
M.B. : Radio Sucesos est une radio très particulière. Elle relate les événements sportifs de la plus grande province de l’intérieur de l’Argentine qu’est la province de Córdoba. Sans aucun doute, c’est la radio qui a l’une des visions les plus décalées du pays. Il faut savoir qu’à Córdoba il y a une grande culture de la radio, comme dans toute l’Argentine d’ailleurs, mais Córdoba c’est particulier. Les gens viennent au stade radio à la main, tu imagines ça ! Pour moi, la radio c’est plus fort que la télé, c’est elle qui t’accompagne partout, tu peux faire passer beaucoup plus de sentiments et c’est cela qui me plaît énormément dans ce métier.
Matias, forcément même un journaliste a une équipe de cœur ici en Argentine. Toi qui relates le football cordobés, tu es supporter d’un club à Córdoba ou ton cœur balance pour d’autres couleurs ?
MB : Je suis pour Boca Juniors. Mais il faut savoir que je ne vis pas à Córdoba même. Je suis du sud de la province de Córdoba et ma famille est porteña (le surnom des habitants de Buenos Aires, ndlr) donc je n’ai pas la même relation avec le football cordobés que les habitants de Córdoba.
« Mon modèle est, et restera toujours, le journaliste argentin Walter Saavedra »
En Argentine, il est difficile de commenter avec la même intensité lorsqu’il s’agit d’équipes rivales. Ici à Córdoba il y a quatre équipes et donc quatre clasicos même si le principal reste Belgrano-Talleres. Comment gères-tu cela ?
MB : Vu que je ne suis pas hincha (supporter, ndlr) d’une équipe en particulier sur Córdoba, je t’avoue que c’est un peu plus simple pour moi. Et puis ce que j’aime dans le football c’est tout ce qu’il se passe autour, le côté social qu’il peut y avoir dans ce sport et non le foot en lui-même. Le côté fanatique, de ne pas pouvoir digérer une défaite, dès fois même la violence, ce sont des choses qui me surprennent toujours car moi, personnellement, ça ne me génère pas ce sentiment.
Tu es devenu très connu surtout pour tes envolées lyriques à Radio Sucesos. Qu’est ce qui t’a poussé à commenter les rencontres de cette façon ? Y-a-t-il une dose de préparation ou est-ce seulement de l’improvisation ?
MB : Pour te dire la vérité, il y a un peu des deux. Je prépare quelques textes mais il y a aussi pas mal d’improvisation. Je suis un passionné de la radio et à Buenos Aires j’écoutais toute la journée la radio mais pas seulement celle d’Argentine. J’écoutais aussi la radio uruguayenne, celles de l’intérieur du pays et je me suis inspiré de tout cela. Mon père est routier et avec lui j’ai appris l’importance que la radio avait dans la vie des gens au quotidien. La radio est souvent la seule compagnie que tu peux avoir dans la journée, c’est donc en pensant à tout cela que j’ai décidé de commenter de cette manière car mon objectif est d’offrir beaucoup plus qu’une simple retransmission à nos auditeurs.
As-tu un modèle au niveau du journalisme ?
MB : Oui, le journaliste que j’admire le plus et qui est, et restera mon modèle, c’est Walter Saavedra. Walter Saavedra est aussi commentateur de football à la radio mais il commente aussi d’autres sports comme le basket ou la boxe. Sa folie, sa passion, sa manière de te faire vivre le moment ou le ballon fait trembler les filets est incroyable. C’est pour tout cela qu’il est mon modèle.
Dernière question Matías, comment le football cordobés est capable de former des grands joueurs comme Pastore ou Dybala mais donne à la fois l’impression de générer moins de passion à l’intérieur du pays contrairement à Rosario par exemple ?
MB : C’est vrai. Mais le cas de Rosario est assez particulier car Rosario est une ville coupée en deux du fait qu’elle possède deux équipes, Rosario Central et les Newell’s Ols Boys. À Córdoba il y en a quatre, Talleres, Belgrano, Instituto et le Racing donc forcément les gens sont beaucoup plus divisés. Mais je peux t’assurer qu’il y a énormément de passion ici où l’on trouve un public populaire. Córdoba est la ville où a commencé la révolution étudiante-ouvrière à l’époque de la dictature, c’est une ville passionnée dans tout ce qu’elle entreprend que ce soit au niveau danse, musical avec Rodrigo qui est une idole ici et qui était supporter de Belgrano. En fait tout ce qu’il y a de culturel, dont le sport et le football. C’est ça qui est beau ici et c’est pour cela que j’aime Córdoba.
Propos recueillis par Bastien Poupat à Córdoba (Argentine) avec Adrien Vicente