Le Kop Of Boulogne voit le jour à la fin des années 70 en référence au Kop d’Anfield de Liverpool. Initialement basé sur un modèle à l’anglaise, le KOB s’est construit une réputation nationale et également sur le plan européen. Entre ferveur et passion mais aussi violence et extrémisme, le KOB a défrayé la chronique pendant de nombreuses années. Zoom sur une tribune ancrée dans l’Histoire du football français.
Les premières pages du Kop Of Boulogne s’écrivent dès 1978 avec la création de la tribune Boulogne. Malgré la naissance de cette tribune, le Parc des Princes n’a pas encore un public fidèle. Les dirigeants du PSG, avec en tête de file le président Hechter, font la sortie des lycées pour remplir les travées du stade. Le club propose des tarifs attractifs : 10 francs pour assister à 10 matchs dont Nantes, Lens et Saint-Etienne (les grosses écuries de l’époque). Ces jeunes supporters massés à Boulogne en tribune K donnent de la voix, les premiers fumigènes se craquent à l’entrée des joueurs. Cependant, le Parc des Princes est souvent acquis à la cause des équipes adverses. Il faut attendre un PSG-Nantes en 16ème de finale de Coupe de France en 1981 avec une victoire 5-3 pour que l’ensemble du stade chante derrière l’équipe de la capitale. L’histoire du KOB est complexe, parallèlement au développement de la tribune, les pavés parisiens sont au cœur d’une véritable bataille. Les fascistes parisiens chassés des rues trouvent refuge au Parc dans la tribune Boulogne. En 1985, des journalistes de Canal+ tendent le micro à des fans à la mi-temps de PSG-Toulouse, ces « supporters » en profitent pour déblatérer leurs idéologies néo-nazis. Au lendemain du drame du Heysel, la France se rend compte qu’elle possède également ses skinheads. Cette même année 1985 voit la création d’un des groupes les plus célèbres, les Boulogne Boys qui sont bien loin de cette politique radicale. Mais en 1989, le KOB prend un tournant radical avec l’arrivée de Serge Ayoub alias Batskin (pour son talent du maniement de la batte de baseball) avec la création du Pitbull Kop. Ce groupe qui est la vitrine des JNR (Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires), association d’extrême droite, prône la violence et cherche à recruter des nouveaux membres. La direction du club entretient des relations avec les groupes de supporters standards tels que les Boulogne Boys, Gavroches ou Firebirds mais reconnait officiellement le Pitbull Kop afin de notamment limiter la violence. La croix celtique, symbole des jeunesses nationalistes peut donc flotter en toute liberté à Boulogne. « N’est-t-il donc pas déjà trop tard pour agir ? Les cranes rasés se sont intégrés au paysage, ils se sont fondus dans le décor. Pour l’immense majorité des pensionnaires de Boulogne, le Paris SG demeure bien sur la priorité et le football une passion sincère mais la seule présence des skins est susceptible de les entraîner dans un engrenage qu’ils ne souhaitaient pas à l’origine », écrit Philippe Broussard dans son enquête sur les ultras du football. Bien entendu, cet extrémisme politique touche une minorité des membres de la tribune Boulogne et les supporters lambda ne se reconnaissent pas en ces individus qu’ils n’arrivent pas à maîtriser.
Le KOB, ennemi public numéro un
Le 28 août 1993, lors de la deuxième journée de championnat, le PSG reçoit Caen. En raison de travaux la tribune Boulogne bleu est fermée, l’ensemble des supporters se retrouvent donc en tribune Boulogne rouge. Au cours du match, les CRS interviennent dans la tribune basse. Mais voilà, les forces de l’ordre ne sont souvent pas les bienvenues dans une tribune de football. Ainsi, les hooligans parisiens encerclent les CRS et les violences débutent. Le bilan se termine avec 10 CRS blessés dont un grièvement. Au-delà de l’hooliganisme, cet événement a fait un tollé médiatique. La France est confrontée à un problème dont elle n’a pas les solutions. La classe politique réagit vite et prend des mesures disproportionnées. Une semaine après l’affrontement, de nombreuses perquisitions ont lieu et les principaux protagonistes écoperont de peines de prison ferme. À trop vouloir bien faire, des individus qui ne se trouvaient même pas au stade ont des démêlés avec la justice. Une répression politique, médiatique et judiciaire s’abat sur le KOB. La première loi a l’encontre des supporters voit alors le jour. Michèle Alliot-Marie est à l’origine de cette loi, qui porte son nom, mettant en place les interdictions de stade notamment. Ajoutez à cela la mort de Julien Quemener, le 23 novembre 2006 après le match PSG-Hapoël Tel-Aviv tué par balle par un policier. La mort de ce supporter de Boulogne est toujours vive avec la légitime défense du policier retenue par la justice contestée par la famille. Cependant résumer le KOB a l’hooliganisme serait réducteur. Les Boulogne Boys ont longtemps essayé de se sortir de ce cliché de supporters violents, racistes, néo-nazis. Malgré tout, les Boys indignent la France le 29 mars 2008 après avoir déployé la célèbre banderole anti-chti « Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les Ch’tis ». Cette « simple » banderole entraîne la dissolution du groupe par le gouvernement. Le hasard a voulu que ce soit la même Michèle Alliot-Marie qui annonce la fin d’un des groupes les plus mythiques des tribunes françaises. Les politiques se félicitent de cette dissolution mais concrètement cette décision plonge la tribune un peu pus dans le chaos. Les Boulogne Boys entretenaient des rapports plus ou moins bons avec la direction. Une association de supporter a pourtant un rôle non-négligeable, permettant l’encadrement de la tribune et de ses membres.
Auteuil/Boulogne une rivalité historique
En 1991, la direction souhaite crée une seconde tribune, le virage Auteuil voit le jour avec en tête de file les Supras Auteuil et les Lutèce Falco (suivie par les Tigris Mystic en 1993). Le second enfant terrible du PSG voit alors le jour. Auteuil grandit dans l’ombre du KOB mais le mouvement ultra à Auteuil prend une ampleur considérable. Lors du dixième anniversaire des Tigris Mystic en 2003, le groupe d’Auteuil rouge déploie une bâche « L’avenir est à nous ». Message subtilement adressé au KOB : nous sommes le futur, vous êtes le passé. Cet anniversaire est le début d’une rivalité qui conduit à de nombreux actes de violences entre les deux tribunes parisiennes. Les deux tribunes parviennent tout de même a s’entendre pour lutter contre la nouvelle politique de sécurité du club en 2004. Mais cette animosité éclate aux yeux du grand public en 2010 lors d’un match contre l’OM. Une rixe éclate devant le Virage Auteuil, cette échauffourée se solde par la mort de Yann Lorence, supporter de Boulogne. La goutte d’eau qui fait déborder le vase pour le ministère de l’Intérieur qui décide la dissolution de l’ensemble des associations de supporters parisiennes. Une décision qui touche 13000 abonnés alors que les actes de violences sont perpétrés par « seulement » 200 hooligans. La direction du club décide également de mettre son grain de sel avec la création du plan Leproux avec la mise en place d’un placement aléatoire des supporters.
Les années post Leproux, le combat continue
Après la mise en place du plan Leproux, les supporters de Boulogne décident du boycott du Parc des Princes tout comme les associations du Virage Auteuil. La première année de boycott est un succès, le stade peine à faire le plein. Les places pour voir jouer le PSG à domicile sont offerts dans les Télé 7 jours, un comble pour le seul club de la capitale en Ligue 1. Cependant, une action de contestation des supporters de Boulogne lors d’un déplacement à Rennes en 2010 entraîne les foudres du président parisien. Alors que les relations avec leurs anciens dirigeants n’étaient pas au beau fixe, cette action tend encore plus les rapports avec Robin Leproux. Mais l’arrivée de QSI en 2011 avec ses investissements massifs change la donne. Le stade est comble à chaque match pour voir jouer la bande d’Ibrahimovic et les prix des places s’envolent. Le boycott n’a plus lieu d’être mais les supporters historiques continuent les actions en contre-parcage lors des déplacements de l’équipe de la capitale. L’un des anciens groupes du KOB, les Firebirds, est rené de ses cendres. Toutefois c’est cet été que l’histoire du Kop au Parc des Princes a pris un tout autre virage. Les actuels dirigeants du PSG ont décidé de déplacer la tribune des visiteurs à Boulogne dans la tribune K. Cet espace qui auparavant se situait en tribune H (près du Virage Auteuil) prend désormais place dans la tribune historique du KOB. Une décision impensable il y a encore quelques années. L’énième symbole d’une page qui s’est réellement tournée dans l’histoire du KOB et du PSG en général.
Le Kop Of Boulogne a marqué le supporterisme français grâce à la ferveur de ses supporters et tant par la violence de ses hooligans. Aujourd’hui la tribune Boulogne sous l’ère QSI n’est plus que l’ombre d’elle-même, la nouvelle frange des supporters ne joue plus son rôle de douzième homme. La récente découverte d’une liste noire des supporters du PSG issus des anciennes associations d’Auteuil et Boulogne démontrent bien la scission entre les supporters historiques et l’actuelle direction. En attendant, Germain se porte bien.