Dans un sport aussi internationalisé que le football, entendre des commentateurs écorcher les noms de tant de joueurs donne une désagréable sensation d’anachronisme. Ce serait vraiment si difficile que ça d’apprendre à les prononcer ?
Le match France-Paraguay a offert aux footeux français trépignant avant le Mondial un spectacle pas folichon sur le terrain. Et pour les téléspectateurs de TF1, le trio Christian Jeanpierre-Bixente Lizarazu-Arsène Wenger a donné d’autres raisons de s’énerver.
« Georgé Rorasse », sérieusement ?
Nous n’allons pas tirer sur l’ambulance : cela fait bien longtemps que les commentateurs de TF1 sont critiqués de toutes parts, et là n’est pas le propos. On connaît tous le sens de l’à-propos inégalable de CJP, la passion de Lizarazu pour tout ce qui touche au Bayern et le charisme débordant de Wenger, n’y revenons pas.
Car le défaut dont nous parlons aujourd’hui n’est hélas pas l’apanage du trio de la première chaîne : ils sont nombreux, les commentateurs français, à prononcer comme des sagouins les noms des joueurs étrangers. Le téléspectateur hispanophone a pu, dimanche soir, friser à une dizaine de reprises la crise cardiaque à l’écoute des « Georgé Rorasse » (Jorge Rojas) et autres « Cojonel » (Ramón David Coronel) – ce dernier ayant dû bien faire rire les Espagnols devant leur télé.*
Si on sait bien que les commentateurs craignent de devoir commenter le Borussia Dortmund et ses Blaszczykowski, Piszczek et autres Grosskreutz, le problème n’est hélas pas circonscrit aux championnats -et aux joueurs- étrangers. Chacun sait que même les équipes de Ligue 1 sont pleines de joueurs étrangers ou d’origine étrangère, avec autant de possibilités de noms casse-gueules. Souvenons-nous de Denis Balbir, un spécialiste en la matière, qui s’obstinait à écorcher de toutes les manières possibles le nom de l’ancien Montpelliérain Mapou Yanga-Mbiwa lors de ses matchs en Bleu.
Le foot est mondialisé : Vivons à notre époque !
Entendons-nous bien : notre but n’est pas de faire du terrorisme linguistique et de forcer les commentateurs à prononcer « Oxlade-Chamberlain » avec le plus bel accent de Cambridge. D’autant que le résultat serait bien souvent ridicule. Mais quand même, « Georgé Rorasse ».
Un commentateur qui ne connaît pas la composition d’une équipe, commettrait une faute professionnelle, n’est-ce pas ? Cela fait partie de son travail en amont du match.
Et bien savoir, tout simplement, comment se prononcent les noms des joueurs, devrait aussi en faire partie. Le fait que les commentateurs continuent à prononcer des noms de divers horizons à la franchouillarde est un énorme anachronisme. À l’heure où l’on peut suivre n’importe quel championnat à travers le monde, et où les équipes championnes ont quasi toutes plus d’étrangers que de nationaux dans leur effectif, les commentateurs semblent en être restés à la bonne vieille époque des années 1970. Mais le foot a bien changé ; il est bien loin le temps où le footeux moyen n’avait qu’un match de Division 1 à se mettre sous le dent, et où, mis à part quelques Skoblar et Onnis, les joueurs avaient des noms tout à fait prononçables, même par l’éternel Thierry Roland.
D’autant que savoir qu’on prononce « Bwastchikovski », que le J en espagnol se prononce comme le Kh en arabe, que Helena (ou Rui) Costa se prononce Coshta, ce n’est pas ça qui va faire crouler les journalistes sous le travail. Et cela leur éviterait de passer pour des cons.
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* Pour les non-hispanophones, cojones est un mot un peu vulgaire utilisé en Espagne, que nous ne traduirons pas.