2 Scudetti, 6 coupes d’Italie, 3 Supercoupes d’Italie, 1 Coupe des Coupes et 1 Supercoupe de l’UEFA, la Lazio Rome est une institution en Italie. Au bord de la faillite au début des années 2000, le club stagne désormais dans le ventre mou de la Serie A. La récente vente de Hernanes a sonné le glas de la patience des tifosi. Un vent de contestation souffle dans la capitale romaine. Décryptage des raisons de la colère des tifosi laziali.
Le 14 mai 2000, la Lazio s’impose 3-0 contre la Reggina, dernier match d’une saison historique. Le club de Rome remporte le Scudetto pour la seconde fois de son histoire et réalise même un doublé historique puisqu’il s’adjuge également la Coupe d’Italie. Alessandro Nesta, Juan Sebastien Veron, Pavel Nedved, la Lazio aligne à cette époque une équipe galactique, à faire rougir n’importe qui en Italie et même en Europe. Depuis, 14 ans ont passé et les ambitions du club de la capitale italienne se sont éteintes. Sous la plus belle ère de son histoire, le président du club se nommait Cragnotti (1998-2003) qui a poussé le club a changé de dimension à coup de chèques. Cependant, remplir l’armoire à trophée en attirant des stars afin de concurrencer les grandes équipes du nord de l’Italie (Milan, Inter, Juventus) a un coup. La Lazio est le symbole de la politique financière opté par les clubs transalpins de l’époque : introduction en bourse, envolée des prix des droits TV, masse salariale en nette augmentation. La Lazio dépense sans compter. Sauf qu’au début des années 2000, les Biancocelesti sont criblés de dettes et le spectre de la faillite de la Fiorentina plane au-dessus de la capitale. Les joueurs ne sont plus payés et le Néerlandais Jaap Stam menace de quitter le club en cas de non-paiement de son salaire. Les joueurs romains haussent le ton et le quotidien Corriere dello Sport titre en une du journal « Cragnotti paie nous ». Après cinq ans dans l’exercice de ses fonctions, Cragnotti met fin à sa présidence et laisse le club romain au bord du gouffre. En 2004, l’entrepreneur Claudio Lotito prend la présidence du club. Les frasques financières des Biancazzuri prennent fin en 2005 quand le club prouve au fisc italien qu’il a les moyens de payer ses 140 millions d’euros de dettes, échappant ainsi à la faillite.
Une ambition sur court terme
Depuis, le climat et les ambitions du club ont bien changé. 31 janvier 2014, dernier jour du mercato. Hernanes meneur de jeu de la Lazio Rome décide de quitter la capitale pour rejoindre l’Inter Milan. Le coût de l’opération se réalise autour de 20 millions. En quittant le club au bord des larmes, le joueur se confie : « Je suis arrivé à Rome pour gagner le Scudetto, mais ce n’était pas possible. Gagner la Coupe d’Italie était vraiment important, mais j’ai réalisé que je ne pouvais pas gagner plus ici« . Alors que les rumeurs faisaient état d’un départ forcé, le Brésilien explique, avec lucidité, que son départ est tout simplement dû à un manque d’ambition du club. Une déclaration qui n’a fait que conforter les tifosi dans leur idée. Leur club est bel est bien entrain de disparaître progressivement des équipes qui comptent en Italie. Les larmes du joueur font revenir chez les tifosi de tristes souvenirs. Ceux de 2002 quand Cragnotti obligea Nesta à quitter le club pour assainir les finances. Après une première partie de saison décevante, on attendait de Lotito un geste. Un effort. Il n’en a été rien. Exit donc Floccari, Sculli et Il Profeta, bonjour Kakuta, remplaçant à Arnhem, et Postiga, sous forme de prêt. Comme à chaque mercato, de nombreux joueurs ont été annoncés du côté de Formello. Paolo Cannavaro pour tenir la baraque en défense, Quagliarella en attaque ou encore la folle rumeur Anelka mais, au final, la Lazio réalise sans doute le mercato le plus décevant des 20 formations de Serie A. Une saison compliquée si l’on rajoute à ça un beau bordel en début de saison sur le banc avec le départ de Petkovic propulsé sélectionneur de la Suisse et le retour de Reja deux ans après avoir démissionné. Les Biancocelesti sont d’ores et déjà éliminés de la Coupe d’Italie et occupent seulement la neuvième position en Serie A, les derniers espoirs de cette fin de saison restant l’Europa League.
Colère de la Curva Nord
Ce manque d’ambition ne passe pas inaperçu auprès des tifosi de la Curva Nord. Les relations entre les supporters et le président Lotito n’ont jamais été au beau fixe mais le divorce est désormais acté. L’initiative « Libera la Lazio » menée par les tifosi laziali consiste à remplir le stade Olimpico le 23 février contre Sassuolo, match a priori sans attrait ne rassemblant pas foule, pour montrer le désaccord vis-à-vis de la gestion du club mené par Claudio Lotito. De plus l’annonce de la vente de Hernanes a entraîné un mouvement de protestation dans la capitale italienne. Près de 500 fans se sont retrouvés devant le centre d’entrainement afin de réclamer un entretien avec la direction. Le club ne prenant pas en compte leur contestation, les tifosi décident alors de se déplacer directement à la résidence de Lotito. En vain, les tifosi sont repartis mais la colère est loin de s’atténuer.
Le transfert de Hernanes a été la goutte d’eau qui a fais déborder le vase. Aujourd’hui, Claudio Lotito gère la Lazio comme une entreprise, sans investir un euro depuis qu’il a sauvé le club de la faillite en 2004. Il restera l’homme qui a permis de mettre les finances du club romain dans le vert mais un piètre président lorsqu’il faut parler et prendre des décisions sur le domaine sportif. Au-delà de son manque d’ambition et de son pragmatisme, les tifosi laziali lui reprochent le fait de n’avoir monté aucun projet depuis sa reprise du club et de vivre saison après saison, sans aucune projection à moyen-long terme. Mais aussi ses déclarations à faire exploser de rire (ou de pleurs) n’importe quel suiveur régulier de la Serie A à coup de : « notre effectif est difficile à améliorer, nous n’avons que des joueurs de qualité » en juin dernier aux plus récentes : « la vente d’Hernanes est bénéfique pour nous » ou encore, à propos de la révolte des supporters : « Les tifosi se sont trompés sur leur rôle. La Lazio a un patron et il s’appelle Claudio Lotito ».
La fracture entre la direction et les supporters ne date pas d’aujourd’hui mais s’est renforcée après la vente d’un des meilleurs joueurs de l’effectif et semble, aujourd’hui, irréversible. Le transfert de trop pour les tifosi qui se réuniront le 23 février pour contester la direction. Bon courage Claudio, tu vas en avoir besoin.
Avec J-C Achilli