L’Atlético Madrid a assuré sa qualification en étrillant le Milan 4-1 après l’avoir difficilement battu chez lui à l’aller. En grande difficulté face à la puissance des joueurs de Simeone, les Milanais ont cédé dès l’entame. Les Espagnols ont ensuite assis leur domination grâce à l’intensité de leur pressing, leur densité athlétique et leur qualité sur coups de pied arrêtés.
Le pressing de l’Atlético / Milan étouffé sur sa gauche
Le match a commencé idéalement pour les Colchoneros avec l’ouverture du score de Diego Costa dès la 3e minute. Dès les premières secondes, l’Atlético a mis en place l’agressif pressing semi-terrain qui la caractérise. Diego Simeone avait légèrement calqué son schéma sur le 4-2-3-1 de Seedorf. Son milieu de terrain s’articulait dans une sorte de 4-1-3-1-1 avec Mario Suarez en pointe basse (dans la zone de Kakà) et Raul Garcia en pointe haute, chargé de couper la relation entre De Jong et ses centraux. Sur les côtés Arda harcèle Abate et Koke s’occupe d’Emmanuelson.
Une fois le ballon récupéré et renvoyé vers Costa, le pressing collectif est monté d’un cran, Juanfran venant apporter son concours à l’étouffement de la relance milanaise. Enfermés dans le coin gauche de leur moitié de terrain, De Jong et Essien sont pris au piège. Poli est trop loin pour apporter son aide – à la fois à la défense et à la transition – et le ballon est irrémédiablement perdu. Le milieu est éliminé et le combo alignement/marquage désastreux de Rami fait le reste. Diego Costa reprend d’un ciseau à l’endroit. Après l’ouverture du score, les hommes de Simeone continueront à pilonner le Milan par la droite. Transformant Essien en milieu gauche et déformant son 4-2-3-1.
Balotelli « déséquilibrant » / l’Atlético pris sur la largeur
Ecrabouillés dès l’entame dans l’entrejeu par ce plan agressif, les Milanisti vont se relever grâce aux déplacements de leurs joueurs offensifs. Kakà dézone à gauche. Balotelli décroche vers le cœur du jeu et attire souvent Miranda. Ces déplacements, couplés à l’intelligence de De Jong sur les sorties de balles du bloc bas de l’Atléti permettent à Milan de regagner de l’air, et du terrain après son temps faible initial.
Mais au-delà des mouvements verticaux de Balotelli, c’est la largeur trouvée par Milan qui fait la différence. Les hommes de Seedorf posent d’ailleurs une pleine minute de possession à la 24e, conclue par un centre d’Abate venu de la droite. L’Atlético va se montrer assez friable sur ce flanc, concédant plusieurs centres jusqu’à l’égalisation (27e). C’est d’ailleurs à la faveur d’un appui sur l’avant-centre de la Nazionale que Milan crée le décalage offrant à Poli l’occasion de centrer.
Un point faible déjà exploité par Ancelotti lors de la demi-finale aller de Coupe du Roi (3-0). En peuplant les ailes, les Madridistes avaient « déplacé » latéralement les 4 milieux rojiblanco vers ces mêmes flancs. Là, pendant ce temps fort, le Milan est parvenu à écarteler cette ligne de 4, trouvant ainsi l’appui décisif dans l’axe. Depuis le début du match, l’un des deux milieux centraux venait souvent se placer entre ses deux stoppeurs, comme un vrai 6 (d’ou le côté « 4-1-3-1-1 »). Sur l’action du but, c’est Gabi qui produit ce mouvement. Balotelli décroche subitement dans le sens inverse, trouvant la fameuse « rupture » décrite dans la vidéo en lien.
Dans ses déclarations d’avant-match, Simeone voyait en Balotelli un joueur « déséquilibrant » et avait décrit l’intensité au milieu comme la clef du match. En mettant l’accent sur les côtés.
La réponse de Simeone
L’analyse prophétique de l’ancien Laziale explique sûrement sa réponse tactique immédiate. Pour pallier à cet « faiblesse » sur la largeur, il a déplacé Raul Garcia du poste de second attaquant à celui de milieu droit, transformant son 4-4-1-1 (4-1-3-1-1) en 4-5-1 à plat (4-1-4-1 défensif). Laissant Diego Costa, seuls avec ses biceps sur le font de l’attaque. En continuant à abandonner le ballon aux Milanais, l’Atlético pouvait maintenant compter sur une bien meilleure assise défensive. Sur les flancs, grâce à la présence de Raul Garcia, et dans l’axe, où Koke devenait un véritable 8 aux côtés de Gabi, alors que Mario Suarez jouait désormais comme un vrai 6, entre les deux lignes. Nullifiant ainsi les décrochages de Super Mario.
Privé d’espace sur la largeur, Milan devait alors allonger pour être dangereux. Il n’est pas passé loin d’y parvenir sur un long ballon de Rami (35e), donnant lieu à un corner dangereux conclu par une tête de Kakà sur un centre de Taraabt. Le but d’Arda Turan ne sanctionne pas vraiment un temps faible mais plutôt un match de gagne-terrain remporté au forceps par l’Atlético, alors que les deux équipes allongeaient. Plus forts dans le duel aérien et à nouveau prompts à mettre Essien sous pression, les Colchoneros pouvaient rentrer au vestiaire avec deux buts d’avance. Non sans faire prendre un terrible bouillon à ce Milan battu dans l’impact, à l’image du coude de De Jong, au duel avec Raul Garcia qui précède le but du 2-1 inscrit par Turan. Sur un nouveau ballon venu de la droite, Juanfran n’est pas loin d’offrir le but de l’année à Raul Garcia, dont le ciseau passe tout près de la lucarne d’Abbiati.
Pressing haut en 5-4-1
Toujours possesseur du ballon face à ce qui ressemble de plus en plus à un 5-4-1 en raison de la position très basse de Mario Suarez, Milan continue à souffrir face à la puissance de l’Atlético. Diego Costa place un tout droit de 50 mètres et sert parfaitement Gabi à la 48e. Le ballon tutoie à nouveau la lucarne. Le bloc de Simeone défend toujours aussi bas et la position « libre » de Mario Suarez empêche Balotelli et les joueurs offensifs du Milan de trouver les « contacts » dont ils avaient profité pour revenir dans le match en première mi-temps. Pour autant, les Colchoneros ne s’interdisent pas des phases ponctuelles de pressing très haut, notamment sur les touches du Milan dans son propre camp. Cette « double tactique » leur coûte cher en énergie, mais elle permet une couverture optimale du terrain et un étouffement total de la relance adverse. Ce pressing défensif est tellement efficace que la possession va s’équilibrer en deuxième mi-temps.
Seedorf abat sa dernière carte à la 70e minute en entrant Pazzini pour Essien, dans un 4-1-3-2 très offensif. Immédiatement mis en danger par Costa après le changement, le Diavolo craque sur coup-franc à la 70e, l’Atlético faisant une nouvelle fois étalage de sa force sur coups de pied arrêtés et de sa puissance dans les airs. Comme sur le coup-franc qui amène le 2-1, c’est Raul Garcia qui prend le meilleur sur De Jong. Le quatrième but de Costa conclut 10 minutes de possession largement à l’avantage des Espagnols, qui l’auront finalement tenu à 47%.
La réactivité de Simeone
Si la qualification est on ne peut plus logique, compte tenu de la forme actuelle du Milan (10e de Serie A) et de sa composition individuelle, ce match retour nous aura offert un beau dialogue tactique entre Simeone et Seedorf.
Pris dès l’entame par la puissance espagnole, les Milanais auront eu le mérite de faire consommer à l’Atlético un vrai temps faible, immédiatement après avoir encaissé un but. En exploitant bien la largeur, comme l’avait fait avant lui son ancien mentor avec le Real, Seedorf a su mettre à mal l’équilibre d’une des meilleures défenses de Ligue des Champions. Mais en repositionnant immédiatement Raul Garcia à droite, Simeone a fait preuve d’une réactivité remarquable. En passant dans un 4-1-4-1 en forme de 5-4-1, Cholo a offert à son équipe la largeur défensive dont elle avait manqué pendant son temps faible avant l’égalisation. Plus à l’aise défensivement et toujours conquérant au pressing, l’Atlético a rééquilibré les débats en terme de possession avant de faire la différence en puissance et par sa qualité sur coups de pied arrêtés.
En étant à la fois capable de jouer très bas, en laissant totalement le ballon à l’adversaire, comme de presser très haut avec beaucoup d’agressivité, l’Atlético présente un profil extrêmement intéressant sans le ballon. Sûrement une des meilleures équipes au monde dans ce domaine.
Le plan de Simeone demande un condition physique optimale et on ne peut pas dire qu’il soit économe sur le plan athlétique. Comme souvent, les Rouge et Blanc ont plus couru que leurs adversaires du soir. Un point faible à exploiter en cas d’opposition de style en quart de finale ?
sources : Canal + Espagne / squawka.com / statszone / gaceta.es