Vincenzo Paparelli s’est rendu tristement célèbre en devenant le second supporter italien à trouver la mort dans un stade de football. Le 28 octobre 1979, le stade Olimpico a été le théâtre d’une tragédie ayant brisé la vie de deux personnes. L’histoire d’un homme à qui rien ne prédestinait une fin si terrible. Récit d’un drame qui a tendance à s’oublier au fil des années.
Le dimanche 28 octobre 1979, la capitale italienne vit au rythme du derby romain. Vincenzo Paparelli, supporter inconditionnel de la Lazio Rome, prend place dans la Curva Nord du stade Olimpico accompagné de sa femme Wanda. Une heure avant le début de la rencontre alors que le supporter biancoceleste mange un sandwich, le drame survint. Dans une atmosphère tendue, la Curva Sud de l’AS Roma s’enflamme et une fusée de détresse traverse l’ensemble du stade pour terminer sa trajectoire dans l’œil gauche de Vincenzo. Le tifoso s’effondre sur lui-même, sa femme assise à ses côtés se brûle en tentant de retirer la fusée du visage de son mari. Les médecins apportent les premiers soins à la victime qui sera évacuée à l’hôpital Santo Spirito. Malheureusement, Vincenzo Paparelli âgé de seulement 33 ans trouve la mort dans la journée laissant derrière lui une femme et deux enfants. Ce fan de la Lazio devient alors la seconde victime du football italien après la mort de Joseph Plaitano, supporter de Salerne, lors d’affrontements contre Potenza en 1963.
Malgré la tragédie, le derby romain se jouera dans une ambiance délétère. La Curva Nord explose de rage et demande à ses joueurs de quitter le terrain en signe de protestation.Le capitaine de la Lazio, Joseph Wilson tente alors de calmer les esprits aux abords de la tribune alors que les tifosi tentent d’envahir le terrain. Le match se terminera sur le score de 1-1 mais malgré un dispositif policier impressionnant, le drame n’a pu être évité. L’adjoint Marinelli, responsable du service d’ordre au stade Olimpico se confia sur le déroulement de la journée : « Ce qui est étonnant, c’est que nous avons trouvé caché des choses dans les endroits les plus improbables lors de notre patrouille habituelle. Nous avons rempli un camion avec des barres de fer, des armes blanches, des pierres, des briques et même 50 fusées du même type de celle qui a tué Paparelli. Nous avons également arrêté quatre personnes ». Les supporters des deux clubs sont consternés face à ce drame et décident d’apporter toute leur coopération afin de résoudre au plus vite l’enquête.
Attrape-moi si tu peux
Dès lors la mort du supporter laziali confirmé, la police Romaine se lance à la recherche du responsable. Le coupable est rapidement identifié. Il s’agit de John Fiorillo, un jeune peintre de bâtiment au chômage, âgé de seulement 18 ans. Le procureur de la république de Rome lance trois mandats d’arrestation à l’encontre de Fiorillo et de ses complices Angelini et Marcioni. Une enquête est également lancée afin de déterminer si le service de sécurité à commis des omissions facilitant le passage d’instruments tels que des fusées.
Cependant, alors que la police est venu chercher le jeune supporter à son domicile, celui-ci est introuvable. En effet, le tifoso giallorossi a préféré fuir immédiatement après la mort de Vincenzo Paparelli. Certains affirment l’avoir vu à Pescara, d’autres à Brescia ou encore à Frosinone entrain d’acheter des cigarettes. Fiorillo vécu pendant quatorze mois une vie de clandestin entre l’Italie et la Suisse avant de se rendre à la police.
En 1987, il est condamné à six ans et dix mois de prison par la Cours suprême pour homicide involontaire. Ces deux complices se sont vu infligés une peine de quatre ans et six mois accusé d’avoir participé à un homicide.
Vincenzo Paparelli, entre hommage et oubli
À l’annonce de la mort de Vincenzo Paparelli, une pléiade de politiciens et hauts responsables du Calcio se rendent à l’hôpital pour rendre hommage à la victime. Le premier étant, Franco Carraro, président du Comité National Olympique Italien. Le capitaine de la Lazio, Joseph Wilson prend la responsabilité de téléphoner à la femme de la victime pour lui exprimer ses condoléances. La mairie de Rome décide de prendre en charge les frais funéraires et de mettre à disposition de la famille un travailleur social.
Les funérailles de Vincenzo Paparelli, proclamées jour de deuil, est le lieu de rassemblement de milliers de personnes venu dire un dernier adieu. La Lazio Rome décide d’envoyer les joueurs de la Primavera pour jouer le match de Coupe d’Italie contre Potenza afin de se rendre à l’enterrement. En signe de solidarité, la région du Latium et la fondation Luciano Re Cecconie (fondation contre la violence du nom d’un ex-joueur de la Lazio) allouent respectivement cinq et un million de lires à la famille. L’AS Roma décide de lui rendre aussi un dernier hommage en apposant une plaque commémorative devant la Curva Nord de l’Olimpico. La famille a quant à elle du mal à se remettre de cette tragédie. Angelo Paperelli, se sent coupable de la mort de son frère. En effet, c’est bien lui qui a prêté sa carte d’abonnement à Vincenzo pour qu’il puisse se rendre au derby romain. De son côté, Wanda Paparelli se sent impuissante après la mort de son mari. « J’ai vu la fusée de l’autre côté du stade… J’ai à peine eu le temps de me retourner pour dire à Vincenzo d’être prudent mais il avait déjà été frappé », confie-t-elle lors de son témoignage.
Les Laziali n’oublient pas Vincenzo et ne manquent pas d’honorer sa mémoire. Lors du cinquième anniversaire de la mort de Paparelli, les supporters déploient une banderole « Vincenzo vit » le long de la tribune tout en scandant « 28 octobre journée de deuil national ». Pour le dixième anniversaire, le « Lazio Club Nuovo Monte Spaccato, Vincenzo Paparelli » est crée. Cependant, il aura fallu à peine quinze ans pour que le devoir de mémoire envers Paparelli ne disparaisse peu à peu de l’esprit des supporters. Et en 1990, la rénovation du stade Olimpico pour la Coupe du monde emporte avec elle la plaque commémorative à la mémoire de Vincenzo. Comme un signe du destin, le nom de Vincenzo Paparelli tombe dans l’oubli. Aujourd’hui les hommages se font rares et le nom Paparelli est le plus souvent sujet de moquerie de la part des tifosi de l’AS Roma. À l’occasion du 28 octobre, de nombreux graffitis apparaissent le long des rues de Rome. L’an dernier, le fils de Vincenzo, Gabriele Paparelli avait vivement réagi aux récents tags dans la ville : « La nuit dernière, en revenant j’ai vu l’écriture sur le cimetière Verano et on m’a dit qu’il y en avait d’autres autour de Rome. Mais je ne voudrais pas donner trop d’importance à ces gestes. Heureusement, il y a un groupe de gars sur Facebook qui me suivent avec passion et se déplacent pour aller les supprimer dès que possible ».
Tout au long de sa cavale, le coupable du jet de fusée John Fiorillo appela quotidiennement Angelo Paparelli afin d’obtenir son pardon et en jurant ne pas avoir eu l’intention de tuer son frère. Fiorillo, décédé le 24 mars 1993 d’une overdose est pourtant parti l’esprit plus léger avec le pardon d’Angelo, de Wanda et des deux enfants de Vincenzo. Le 29 octobre 2001, 22 ans après la tragédie, une nouvelle plaque commémorative est placée devant la Curva Nord afin que ce jour noir ne bascule pas dans l’oubli.