Face à un Barça sans idée, sans créativité et sans plan B, l’Atlético s’est qualifié pour les demi-finales de C1. Auteurs d’une entame colossale grâce à un pressing monstrueux, les coéquipiers de David Villa ont vite pris l’avantage. Avant de tenir grâce à un double plan défensif parfaitement échafaudé.
Comme ce fut le cas lors du match aller, l’Atlético entame la partie par une séquence de pressing haut. Villa et Adrian viennent fermer les lignes de passes latérales et Gabi sort de son poste de 8 pour harceler Busquets. Avant que le repli ne s’opère, laissant place à l’attaque-défense annoncée.Le Barça utilise alors la largeur, mais les efficaces compensations latérales de l’Atlético rendent déjà stérile sa possession. Quand Courtois allonge, le pressing tout-terrain se remet en place, à l’initiative de Koke, qui vient à son tour faire le nombre et presser Busquets, alors que Gabi agresse Alba, mal servi par Mascherano, lui même pressé par Adrian. La première frappe de Garcia est au dessus, et dès le six-mètres qui suit, Iniesta vacille face à Gabi, même si le ballon doit repasser par Courtois.
Si l’Atlético ressemble à un 4-3-3 sur ses séquences de pressing haut (Koke ou Gabi venant se joindre à l’attaque), c’est également le cas sur les ballons venus de derrière. Sur chaque dégagement, la cible de Courtois était toujours la même : le côté gauche de la défense barelonaise. Raul Garcia s’y niche comme un troisième attaquant, profitant de son avantage de taille sur Alba. Il provoque le premier poteau touché par Adrian, suivi du but de Koke sur lequel le pauvre latéral espagnol est piétiné dans la raquette pour la troisième fois en 5 minutes.
Le Barça cède très tôt, et paie – comme souvent cette saison – sa plus grosse faiblesse : les airs. C’est une tornade qui s’abat sur lui pendant le premier quart d’heure. Rarement on a vu Busquets déguster un tel bouillon. Constamment pris à deux et suivi jusqu’à sa ligne de 6 mètres. Le club catalan s’obstine à relancer court, et n’a de toute façon pas de plan B, déplorant plus que jamais l’absence d’un attaquant de taille, capable de lui donner un peu d’oxygène dos au but.
Le faible jeu au pied de Pinto n’est sûrement pas étranger à une telle approche de la part de l’Atlético. Mis en grande difficulté par les positions d’Adrian et Villa sur les 6 mètres, il doit aller chercher ses latéraux 15-20 mètres derrière la ligne médiane, dans une position très inconfortable. Invariablement, le ballon revient, et le Barça plie face au tsunami rojiblanco qui déferle sur sa relance laborieuse. Terrible signe d’impuissance tactique : Pinto allonge sur Neymar. Le ballon revient évidemment aussi tôt et Busquets cède de nouveau face à une prise à deux Gabi/Koke. Face à un Barça qui défend de plus en plus bas, Villa prend l’espace et frappe le poteau. Après 10 minutes, on n’a vu qu’une seule (et courte) séquence de pa-passes dans le camp de l’Atlético. Et le Barça est déjà KO.
L’impuissance du Barça face au repli
Naturellement, l’Atléti recule après cette entame intense. Utilisant l’habituelle recette de son rudimentaire 4-4-2 en phase de repli pour détruire toute tentative d’appui entre ses lignes resserrées. Les Barcelonais ne peuvent créer le contact qu’au-delà du premier rideau et sont condamnés à l’impuissance offensivement. Face à un bloc bas qui défend en avançant, ils doivent reculer.
La transition n’est pas aisée sans Diego Costa. Villa et Adrian doivent s’embarquer dans d’harassants cadrages-débordement en sous-nombre, mais ils résistent, et obtiennent de précieux coup-francs qui font remonter le bloc. L’Atlético parvient à sortir de son camp, et les six-mètres de Pinto sont déjà des occasions. Les parpaings envoyés à destination de Neymar sont cueillis par l’arrière garde madrilène et quand c’est Juanfran qui allonge, Raul Garcia marche encore sur Alba. Sa tête trouve Villa dans l’espace, l’ancien Culé prend Bartra de vitesse et frappe sur la barre.
À ce point étouffé et sans solution, le Barça est condamné à une verticalité contrariée. Les ballons ne sortent pas vite pour surprendre l’adversaire, ils sortent précipitamment pour survivre, et voir le camp adverse. Seules options : les centres ou le dribble. Sur une séquence de pressing haut, il faut un enchaînement exceptionnel de Neymar pour offrir à Messi l’occasion d’égaliser.
- Les 3 configurations de l’Atléti : À gauche, celle des longs ballons de Courtois à destination de Raul Garcia, au centre celle du pressing dans laquelle Gabi (ou même Koke) sort sur Busquets, à droite celle du repli, la plus caractéristique de l’Atlético, qui lui permet de survivre à ses temps faibles.
Le deuxième tiers du match est celui du repli pour l’Atlético, une chronologie surement voulue, et validée par l’ouverture du score. L’impuissance du Barça en attaque placée était déjà manifeste à l’aller. Là, face à un Atléti plus presseur, et donc moins déséquilibré, elle est sans équivoque. Rien ne l’illustre mieux que l’inhabituelle profusion de centres lâchés pas les latéraux barcelonais (30 dans le jeu !).
Why is barca crossing the ball in the air with guys who’re 5foot7 ?
— R.Lukaku Bolingoli (@RomeluLukaku9) April 9, 2014
Le Barça et les six mètres de son gardien sont mis en difficulté dans les mêmes circonstances en seconde mi-temps. Mais comme ce fut le cas à Madrid, (même si ce fut bien plus épisodique hier soir), le Barça compte sur sa qualité technique pour se sortir du pressing adverse. C’est une sucrerie de Xavi qui permet d’éliminer Thiago et de casser la ligne sur une séquence de pressing, ce qui offre à Neymar le face-à-face de la 48e avec Courtois. L’Atlético a pris un risque nécessaire en pressant si haut, son gardien a répondu présent au moment clé.
La deuxième mi-temps est une copie conforme du match aller : les Barcelonais ont le ballon, mais ne peuvent rien en faire, face aux lignes serrées de l’Atlético. L’entrée de Diego pour un Adrian carbonisé par ses courses en solitaire fait gagner quelques mètres aux Castillans. Les Colchoneros remontent leur bloc et passent (encore) tout près d’un penalty sur une charge de Mascherano sur Villa. Martino fait lui entrer Alexis pour Cesc et Pedro pour Iniesta. Neymar passe dans l’axe et les Catalans finissent dans une sorte de 2-4-4.
Mise à part la tête de Neymar à la 77e, le Barça ne se crée pas de réelles occasions d’égaliser, même en empilant les joueurs offensifs. Capables de gérer la largeur, la profondeur et le jeu entre les lignes grâce à leur repli et les compensations de leur latéraux, les Madrilènes passent finalement une fin de match très tranquille, comparée aux derniers adversaires du Barça en pareilles circonstances ces dernières années. La plus belle opportunité est même pour Christian Rodriguez, entré à la place de Villa. Sur un contre. Évidemment.
L’équilibre grâce au pressing / Football total
En revenant au Calderon avec un nul, l’Atléti n’était pas forcément un position de force et prendre le risque de concéder l’ouverture du score en s’accrochant péniblement au 0-0 n’était pas une option envisageable. L’Atlético a mis le Barça sous une terrible pression pendant le premier quart d’heure, et ce temps fort a été récompensé par un but. Ensuite, en alternant des séquences de pressing haut et de repli compact, les Colchoneros se sont assurés la conservation de leur avantage. Et n’ont finalement pas trop souffert. Le Barça s’est créé ses plus belles occasions en jouant direct, ou par des têtes sur deux de ses nombreux centres. Plus que jamais, le jeu de passe sur la largeur était prévisible (et prévu par l’Atlético). Mêmes les joueurs catalans semblent fatigués mentalement par cette approche qui manque désormais singulièrement de fraîcheur.
Tactiquement, Martino –ou plutôt l’idéologie cruyfiste dont il n’ose pas se démarquer– a été massacré. Le Barça a commis le pêché qui lui vaut tant d’inimitié à travers le monde : la suffisance. N’ayant qu’un seul plan à imposer à une équipe qui en avait 3 à lui opposer. L’idée de mettre Raul Garcia à droite pour s’assurer la maîtrise des duels aériens (décisive sur le 1-0) illustre bien cela. C’est Cholo qui a eu l’intelligence –et en un sens l’humilité– de s’adapter aux qualités, et donc aux limites, de son adversaire.
La parfaite combinaison des 3 organisations pressing –longs ballons– repli a donné l’impression que les Colchoneros étaient 15 sur le terrain. En le quadrillant parfaitement grâce à un plan bien échafaudé, ils se sont totalement prémunis de la qualité offensive du Barça. L’effort produit par Villa et Adrian au moment de jouer les contres en sous-nombre a soulagé le bloc bas de l’Atlético. Comme la qualité de Piqué en 1 contre 1 soulageait le bloc haut du Barça du temps de Guardiola. De nombreux joueurs ont travaillé sur deux lignes, et des surnombres ont été créés à tous les endroits du terrain. Pressing, zone haute, dépassement de fonction défensif et offensif : Aujourd’hui, bien plus que celui du Barça, c’est le football de Diego Simeone qui est total.